Phèdre, une réécriture de Sénèque
Par Raze • 2 Mai 2018 • 1 541 Mots (7 Pages) • 528 Vues
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- Il existe, en revanche, un personnage qui n'est pas présent dans la version de Racine mais qui l'est dans celle de Sénèque : le choeur qui commente les actions qui se déroulent, mettent un évènement, un sentiment ou une injustice en évidence et invoquent les Dieux. Cela permet au spectateur de comprendre mieux les différents évènements, qui sont alors davantage dramatisés.
De plus, à la lecture de quelques extraits de la version de Sénèque, on remarque que le texte est écrit en prose, contrairement à celui de Racine, écrit en vers. On note aussi concernant le caractère d'Hippolyte, qu'il n'est pas seulement inintéressé par les femmes mais il les hait.
Malgré les nombreuses différences que l'on peut relever, Racine s'est tout de même beaucoup inspiré de l'oeuvre de Sénèque. L'aveu de Phèdre à Hippolyte, les accusations voilées de Phèdre à Thésée, la mort d'Hippolyte sous l'effet de l'emballement de ses chevaux, l'aveu et la mort de Phèdre après celle du jeune homme sont des éléments qui montrent bien que Phèdre de Racine est une réécriture de Phèdre de Sénèque.
Plus précisément, des points communs apparaissent comme l'invocation fréquente de Dieux, l'importance de La Nourrice (Oenone chez Racine) qui conseille Phèdre et modifie le déroulement de la pièce et bien sûr le mythe général, qui reste le même malgré les différences : celui d'une femme amoureuse du fils de son mari.
Voici une réplique de la version de Sénèque. Elle se situe à l'acte 4 scène 1 : le messager commence à raconter à Thésée la mort d'Hippolyte.
LE MESSAGER.
A peine eut-il quitté la ville d'un pas rapide, que, pour rendre sa fuite encore plus prompte, il attela sur-le-champ ses superbes coursiers et prit en main les rênes de son char. Alors il se parla quelque temps à lui-même, maudit le lieu de sa naissance, prononça plusieurs fois le nom de son père, et lâcha les rênes en excitant la marche de ses coursiers. Tout à coup la vaste mer se soulève, monte et se dresse jusqu'au ciel. Aucun vent ne souffle sur les flots, l'air est calme et silencieux, la mer est tranquille au dehors, c’est d'elle-même qu'est sortie la tempête : jamais l'Auster n'en excita de semblable dans le détroit de la Sicile, jamais le Corus ne souleva avec plus de fureur la mer d'Ionie, dans ces tempêtes effrayantes où l'on a vu le mouvement des flots ébranler les rochers, et leur blanche écume couvrir le promontoire de Leucate. — La mer monte et se dresse comme une montagne humide, qui, chargée d'un poids monstrueux, vient se briser sur le rivage. Ce n'est point contre les vaisseaux qu'est envoyé ce fléau, c'est la terre qu'il menace. Les vagues roulent avec violence ; on ne sait quel est ce poids que la mer porte dans ses flancs, quelle terre inconnue va paraître sous le soleil. Sans doute c'est une nouvelle Cyclade. Les rochers où s'élève le temple du dieu d'Epidaure ont disparu sous les flots, et avec eux le pic célèbre par les brigandages de Sciron, et la terre étroite que les deux mers embrassent. — Pendant que nous contemplons ce spectacle plein d'horreur, la mer fait entendre un mugissement terrible répété par les roches d'alentour. L'eau découle du sommet de la montagne humide, l'écume sort de cette tête effrayante qui absorbe et renvoie les vagues. On croirait voir le terrible souffleur bondir au milieu des flots, et lancer avec force l'eau qu'il a reçue dans ses vastes flancs. — Enfin cette masse énorme s'ébranle, et, se brisant à nos yeux, jette sur le rivage un monstre plus effroyable que tout ce que nous pouvions craindre: la mer se précipite en même temps sur la terre à la suite du monstre qu'elle a vomi. — La terreur nous glace jusqu'aux os.
Ayant étudié cette même scène dans la version de Racine on peut donc facilement les comparer.
A part la fuite rapide et énervée d'Hippolyte dans la version latine, comparée à une fuite forcée et triste dans la version française, cet extrait est quasiment similaire à celui de Racine.
On retrouve Hippolyte tenant les rênes de ses « superbes coursiers » (terme apparaissant dans les deux versions), la mer déchaînée et le terrible monstre. Un registre épique et pathétique commun est employé.
Toutefois, on peut noter que la description est plus détaillée chez Sénèque, ce qui peut paraître normal puisque c'est un texte en prose, et ainsi plus facile à détailler qu'un texte en vers, comme chez Racine.
Pour conclure, Racine s'est bel et bien inspiré de Sénèque pour l'écriture de Phèdre, malgré ses adaptations personnelles qui rendent les deux pièces très différentes l'une de l'autre, bien qu'elles aient de nombreux points communs. On peut alors supposer qu'un auteur ne réécrirait pas une pièce sans but précis, le but
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