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Le Nomadisme Californien

Par   •  15 Juin 2018  •  5 174 Mots (21 Pages)  •  487 Vues

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IBM en vend 1 million. Dix ans plus tard, Microsoft est devenue l’une des cinq premières entreprises mondiales. En 2007, 271 millions de micro-ordinateurs sont vendus et plus de 1 milliard sont en service de par le monde. En même temps, apparaissent deux autres outils majeurs du nouveau nomadisme : le téléphone portable .et Internet. Ils s’installent tout aussi lentement que l’ordinateur, mais triomphent en se connectant l’un à l’autre. Pour les sédentaires, ils sont des substituts au voyage ; pour les nomades, des moyens de rester en relation entre eux et avec les sédentaires. L’un et l’autre permettent à chacun d’avoir, pour la première fois, une adresse non territoriale (numéro de téléphone mobile ou adresse e-mail).

Le premier téléphone mobile non militaire apparaît en Grande-Bretagne à la fin des années 1970. Il nécessite d’abord l’allocation d’une fréquence et une batterie portative très encombrante, jusqu’à ce que les réseaux cellulaires augmentent les capacités de transmission et que les batteries se miniaturisent. En trente ans, le mobile devient planétaire et fait circuler voix et données. Il est aujourd’hui le plus grand succès commercial de tous les temps : en 2006, plus de 2 milliards de personnes, soit un tiers des humains, en disposent.

Parallèlement, il devient possible de mettre en relation deux ordinateurs par téléphone. Dans ce cas-là aussi, la généralisation d’une nouvelle technologie prendra trente ans : c’est Internet. Le cheminement en est très intéressant. En août 1962, le MIT, prestigieuse université située près de Boston, publie les premiers textes décrivant les interactions possibles dans un réseau d’ordinateurs qui seraient reliés par téléphone ; en 1965, est testée la première connexion informatique à longue distance entre un ordinateur situé dans le Massachusetts et un autre situé en Californie. En 1969, des centres névralgiques de l’US Army créent le réseau Arpanet pour échanger entre eux des informations électroniques en toute confidentialité. En 1979, des étudiants américains créent les premiers newsgroups pour communiquer des données civiles à travers les quelques centaines d’ordinateurs connectés dans les centres de recherche et les universités. En 1981, Arpanet arrive en Europe. La même année apparaît le protocole TCP/IP et le mot « Internet ». En 1983 est ouvert le premier serveur gérant des noms de sites. En 1984, mille ordinateurs sont connectés; en 1989, Internet s’ouvre au grand public et se créent les premières adresses e-mail. En 1991, Tim Berners-Lee, un chercheur britannique travaillant dans un centre de recherche nucléaire européen à Genève, le CERN, invente une langue commune pour tous les acteurs connectés à ce réseau, le html ; il organise la communauté de ceux qui l’utilisent, qu’il nomme le World Wide Web et dont il met en ligne, le 6 août 1991, la première adresse (http://info.cern.ch/).

Leçon pour l’avenir : nombre d’innovations majeures sont le produit du travail de chercheurs payés sur fonds publics pour chercher tout autre chose.

Surgissent alors de très nombreuses applications de l’informatique connectée; elles sont, elles aussi, destinées à améliorer la productivité des services : logiciels de gestion commerciale, de courrier électronique, de commerce électronique, d’échanges de données financières. En 1992, un million d’ordinateurs sont connectés; ils sont dix millions en 1996, deux milliards en 2008.

Internet apparaît alors comme une sorte de nouveau continent, cette fois virtuel, à découvrir, à peupler, à organiser, avec un champ infini pour des activités marchandes. Certaines entreprises de logiciels deviennent parmi les premières du monde : Microsoft, AOL, Oracle, Google, pour la plupart devenues californiennes. En 1998, le chiffre d’affaires de l’économie d’Internet dépasse celui des télécommunications et des compagnies aériennes. Plus encore, Internet démultiplie aussi les moyens du téléphone portable, qui devient progressivement lecteur vidéo, appareil photo, récepteur de télévision, éditeur de blogs. En 2004, Apple comprend que le profit se fait sur l’objet nomade et non sur les données qui y circulent, gratuitement pour l’essentiel : l’Ipod remplace le baladeur, là encore avec des centaines de millions d’exemplaires vendus.

Les jeux vidéo, mêlant curiosité et aventure, se développent aussi; d’abord sous forme de logiciels pour joueur solitaire, puis ils se connectent à Internet et deviennent des jeux multijoueurs à la croissance exponentielle : en 2006, 100 millions de personnes jouent en réseau et achètent pour plus de 1 milliard de dollars de biens virtuels.

Au total, en 2006, l’activité sur Internet dépasse les 4000 milliards de dollars dans le monde, soit 10 % du PIB mondial, dont la moitié aux États-Unis.

Internet accélère aussi le développement des services financiers ; grâce à lui, le rapport entre l’économie financière et l’économie réelle augmente massivement, passant aux États-Unis de 2 en 1970 à 50 en 2006. Les transactions financières internationales représentent, en 2006, 80 fois le volume du commerce mondial, contre 3,5 fois en 1997, ce qui signifie que le volume du commerce mondial annuel ne représente plus que 4,3 jours de transactions sur le marché des devises, des titres et des options diverses.

Le marché de l’assurance devient lui aussi, grâce à Internet, considérable; il accélère également la croissance des systèmes financiers en couvrant les principaux risques sur les principaux marchés. L’assurance des biens et des personnes représente en 2006 environ 10 % du PIB aux États-Unis, et 5 % du PIB mondial, soit 2500 milliards de dollars, contre 2000 milliards pour l’énergie. Les fonds de couverture de risques gèrent environ 1,5 trillion de dollars en 2006, soit le double de l’an 2000. Ces fonds représentent un tiers des transactions boursières ; ils commencent même à prendre des participations actives dans des entreprises cotées, gérant des actifs de particuliers, et plus seulement ceux des acteurs financiers. Ils prennent parfois des risques illimités et prennent des paris sur des risques sans en avoir le financement !

Le centre de gravité économique et démographique des États-Unis se déplace alors du Nord-Est vers le Sud-Ouest : en 2006, la Californie est devenu le premier des États en termes de PIB (13 % du PIB américain pour 12 % de la population) et se classerait sixième au monde si elle était un État indépendant. Entre 1980 et 1990, 54,3 % de la croissance démographique nationale se fait en Californie, en Floride et au Texas. À partir de 1990, le Sud et l’Ouest américains rassemblent plus de la moitié de la population

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