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Problématique sociale issus du terrain

Par   •  2 Septembre 2017  •  3 308 Mots (14 Pages)  •  538 Vues

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- Vers la désinsertion sociale

De nombreux récits montrent que la population des ménages pour lesquels la procédure d’expulsion est allée jusqu’à son terme, se caractérise par un cumul de bouleversements qui viennent s’ajouter à des difficultés économiques et personnelles.

Pour expliquer la cause ou l’origine de l’impayé, plus de la moitié des ménages ainsi que les professionnels évoquent une baisse des revenus dont les deux principales causes sont d’une part la perte d’emploi impactant les recettes du budget familial et d’autre part la séparation, en raison de son impact pour la personne qui, en restant dans le logement, doit assumer seule une charge de loyer auparavant partagée entre les conjoints. Le processus déclenché par ces ruptures d’origine économique (perte d’un emploi) ou familiale (séparation, maladie, deuil) entraine un bouleversement dans le ressenti de l’individu engendrant peu à peu une désinsertion sociale. En effet, l’individu a honte, se sent dévalorisé, « hors norme »[2] et déclassé ; c’est le sentiment de la déchéance sociale. De plus ces personnes qui connaissent une séparation et/ou une perte d’emploi se trouvent confrontées à d’autres difficultés d’ordre familial, psychologique ou de santé, situation définie par S. PAUGAM comme un "processus de descente aux enfers". [3]

L'accumulation exceptionnelle d’épreuves empêche ceux qui y sont confrontés de prendre la mesure réelle des conséquences prochaines de l’impayé de loyer. Les travailleurs sociaux interrogés rendent compte de l'état psychologique de ces personnes. Les difficultés liées au logement représentent alors «seulement» un problème parmi tous les autres et pas forcément le prioritaire qui est celui de trouver la nourriture au jour le jour surtout quand il y a des enfants. Les travailleurs sociaux pensent que les ménages ne se mobilisent pas, ne sollicitent pas les dispositifs qui pourraient leur apporter une aide, du fait de leur fragilité psychologique et émotionnelle provoquée par l’accumulation des difficultés. Il apparaît clairement dans les propos des usagers que, bien souvent, les impayés de loyer ne sont pas une cause, mais une conséquence du bouleversement de leur situation tant au point de vue professionnel que personnel.

- Des représentions et de l’incompréhension face à la menace d'expulsion

La dégradation rapide d’une situation s’accompagne souvent d’une difficulté à réagir utilement aux injonctions de la procédure. En effet, face aux difficultés, l’individu peut mobiliser des mécanismes psychiques de défense, en grande partie inconscients, qui lui permettent de supporter, masquer ou oublier ses problèmes. Il passe par des phases d’évitement en s’isolant, de déni en fuyant la réalité et de résignation en renonçant à s’en sortir. Pierre-Paul LACAS définit le déni « comme un mode de défense particulier, où le sujet refuse de reconnaître la réalité d'une perception traumatisante tout en la reconnaissant d'une certaine manière. »[4]

Souvent le statut professionnel ou la situation économique a tenu la personne suffisamment éloignée du bénéfice des prestations sociales (artisan, auto-entrepreneur), pour que, lorsque les difficultés commencent à survenir, elle ne fasse pas valoir ses droits, notamment en matière d’aide au logement. Parfois, plus que la situation économique, c’est la représentation qu’elles se font de leur position sociale qui empêche les personnes de solliciter le soutien d’un travailleur social. Selon Denise JODELET " Le concept de représentation sociale désigne une forme de connaissance spécifique, le savoir de sens commun, dont les contenus manifestent l'opération de processus génératifs et fonctionnels socialement marqués. Plus largement, il désigne une forme de pensée sociale. Les représentations sociales sont des modalités de pensée pratique orientées vers la communication, la compréhension et la maîtrise de l'environnement social, matériel et idéel. "[5]Il s'agit de déjouer le stigmate en refusant d'appartenir au monde des exclus. Chaque société se définit un système de valeurs, de normes que ce soit dans le cadre de la réussite professionnelle que de l’épanouissement personnel. Face à ces représentations normatives, l’individu en difficulté ne répondant plus à ces critères, a l’impression de perdre sa place sociale, d’être déclassé et il retarde au maximum sa venue au service social qui devient un appel à l’aide. L’absence de contact avec les services sociaux va retarder la mise en œuvre d’une solution viable (qu’il s’agisse d’obtenir une aide financière pour envisager le maintien de son titre d’occupation ou d’accompagner une démarche pertinente de relogement), et les maintenir dans une situation qui leur semble sans issue.

De plus, le questionnement révèle que les ménages ne connaissent pas leurs droits. Ils ne prennent pas toujours connaissance des informations qui leur sont toutes délivrées par courrier. Paradoxalement la multiplication de ces informations dont les termes mis en valeur alertent, angoissent provoquent une lassitude, un découragement. Beaucoup ressentent cette multiplication comme un harcèlement d’autant plus fort que ces lettres ne leur fournissent pas de solutions facilement perceptibles pour sortir de la situation dans laquelle ils se trouvent. Les lettres relatives à la procédure ne font que s’ajouter à toutes les autres (rappels de factures énergie, relances des organismes de crédit, mises en demeure diverses...); souvent, les ménages ne retiennent des informations transmises par l’huissier que leur caractère d’injonction, sans prêter attention aux informations complémentaires qui pourraient leur être utiles ; ainsi aucune personne enquêtée n’a tiré profit des coordonnées du Fonds de Solidarité Logement figurant pourtant obligatoirement sur le commandement de payer. Terrifiés par un vocabulaire juridique qu’ils ne maitrisent pas, ils ne les lisent plus.

II) La réflexion autour de la prévention des expulsions

Par la loi DALO de 2007, l’Etat doit, par obligation morale et réglementaire, garantir un droit au logement à tout citoyen et reloger les ménages menacés d’expulsion. Certes le préfet dispose d'outils pour prévenir les expulsions locatives mais non utilisés par les individus concernés qui se trouvent en situation de désinsertion sociale. Quels sont donc ces dispositifs ? Pourquoi sont-ils sans effet et comment répondre à cette problématique

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