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Exposé sur la littérature enfantine genrée

Par   •  3 Décembre 2017  •  15 502 Mots (63 Pages)  •  491 Vues

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Dans l’approfondissement de tel dire, Cromer et Turin s’intéressent dans leur article à l’impact de ces images sur les jeunes lecteurs ; c'est-à-dire les enfants de moins de 10 ans. Elles remarquent en effet que ces albums sont composés majoritairement d’images représentant la sphère familiale et les relations hommes/femmes et que les enfants y sont très sensibles. En effet, dans l’ouvrage de Belotti, nous retrouvons dans les livres examinés que la famille type obéit à un schéma : père, mère, deux enfants dont l’ainé est toujours un garçon.

La scène courante décrite est celle d’un père qui lit son journal, insensible à sa femme et à ses enfants ; la mère, effacée, reprise un vêtement. Le petit garçon joue avec son meccano et la petite fille s’amuse avec une poupée, l’air désabusé. Nous pouvons prendre comme exemple la collection Je saurai lire vite … et bien où page 57 nous pouvons apprendre les sons our-oir-eur-oeur en lisant : « Le soir arrive, maman allume le fourneau pour cuire la soupe ; Alain joue au tambour ; papa lit son journal… », illustré d’une petite image.

S.Cromer et A.Turin expliquent que l’accès à ces albums est très important, et autant présent à l’école qu’à la maison ; et les enfants ont eu donc tout le temps de les regarder et d’emmagasiner ces formes de représentation. Le problème concerne donc la portée de ces représentations. Comment présente-t-on ces modèles sexués ? Ces images entraineraient-elles les enfants à adopter un comportement plutôt sexiste ? Seulement ces impacts sont largement ignorés, malgré de nombreux problèmes persistants comme « l’échec de la diversification de l’orientation des filles et des métiers pour les femmes ». Au final elles en viennent à s’interroger sur une possible relation entre ces échecs et les représentations des relations hommes/femmes dans les albums illustrés. Pour ce faire, S.Cromer et A.Turin vont entreprendre un programme de recherche européen intitulé « Attention Albums ! » concernant la France, l’Italie et l’Espagne ; et avec l’association « Du côté des filles » elles vont vérifier les représentations véhiculées dans les albums et prennent comme matériau la quasi-totalité de la production de 1994, soit 537 albums. Elles mesurent la présence des hommes et des femmes ainsi que des filles et des garçons ; les images que l’on nous montre de ces derniers ; mais également les symboles attribués à l’homme et à la femme (par exemple le tablier pour la femme et le journal pour l’homme). Ensuite, elles vont confronter leurs résultats à des enfants « ayant accès aux livres et à la lecture » et à des adultes, tous de la classe moyenne, sous forme d’entretiens qualitatifs. Le but est de mesurer l’impact de ces représentations sur les lecteurs. Elles montrent des images très représentatives en attendant une interprétation des enfants.

Dans une première partie, elles vont donc nous énumérer tous les détails très représentatifs des relations inter sexes et des rôles sexués qui sont diffusés dans ces supports, ainsi que le lexique utilisé. Elles nous montrent que les images des femmes sont très caricaturales, et que leur présence dans les rôles principaux est très minoritaire par rapport à celle des hommes ; et que la transmission de ces représentations se fait grâce à un lexique particulier, celui des symboles. Ils sont divisés en deux parties, ceux attribués aux hommes et ceux attribués aux femmes, dans le but de montrer et de diffuser « les modèles sexués socialement acceptables » ; et abordant des thèmes variés. Pour exemple : « Nous avons créé, pour tester la signification du tablier, l’image d’un grand ours aux caractéristiques « masculines » marquées (dents, griffes et geste menaçant) qui porte un tablier […]. La presque totalité des enfants, filles et garçons, répond que c’est une maman « parce qu’elle a un tablier ». Dans ces albums la représentation du masculin aussi apparait très caricaturale et finalement ce support ne représente pas « un monde mixte » ; chaque sexe est enfermé dans son rôle.

A.Novelle, s’est, elle aussi, intéressée au physique des personnages. Elle fait la remarque que les filles et les femmes sont nettement reconnaissables par leurs vêtements comme le tablier et des objets féminins comme des bijoux. De plus, les personnages anthropomorphiques sont plus habituellement dotés de caractéristiques physiques humaines sexuées que les personnages de sexe masculin comme de longs cils, du rouge à lèvre ou de la poitrine. A.Novelle est la seule des ces trois auteurs à faire allusion aux personnages animaux dans les livres pour enfants. Ces ouvrages concernent majoritairement un public d’enfant de 0 à 6 ans. En effet, à cet âge, les enfants s’identifient plus à des personnages non réalistes qu’à des personnages humains. De plus, pour les adultes, les personnages animaux sont asexués et de ce fait, pour eux, il n’y a pas de sexisme possible. Or, il a été démontré qu’un sexe a pu être attribué pour presque tous les personnages. Pour ceux qui n’ont pu être identifiés comme féminin ou masculin, des observations ont montré que les mères, lors de la lecture, les qualifient de personnage masculin. Cette étude décrite par A.Novelle montre que la représentation d’animaux, soi-disant asexués dans les histoires, amplifie la sur-représentation du sexe masculin.

Ainsi comme l’a constaté J. M de Lauwe, dans le livre de Belotti, qu’ils soient embellis ou fictifs les personnages des récits pour enfants symbolisent les valeurs propres à la culture dont les enfants font peu à peu l’apprentissage. Le fait que les protagonistes soient majoritairement masculins engendre un sentiment naturel d’exclusion des petites filles. Ce décalage, reflet de la société, témoigne d’une réalité dans laquelle les fillettes ont une vision du monde où les femmes n’ont pas leur place. Cet ensemble de faits concoure à la difficulté des filles à s’identifier ou à admettre leur sexe. S.Cromer et A.Turin sont du même avis et expliquent que ces albums engendrent un manque de modèles auxquels les filles pourraient s’identifier, et cet impact expliquerait en partie, la faible présence des filles dans certains domaines et le fait qu’elles-mêmes ne s’y intéressent pas.

Contrairement à S.Cromer et A. Turin, A.Novelle constate dans son analyse, qu’il a une évolution dans le sexisme de la littérature pour enfant. En effet, « le rapport entre les personnages est passé de 10 à 2 durant le siècle dernier ». Il ne faut pas pour autant croire que les femmes ne sont plus victimes de sexisme dans la littérature enfantine. Il est vrai

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