Vive Charlotte Corday!

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Marat est aigri du fait de sa non reconnaissance par l’Académie des sciences qui lui refuse toute allocation, lui qui recherche la gloire à tout prix (il parle lui-même d’amour de la gloire et se considère comme un génie) . Il recherche aussi des subsides, qui vont lui manquer à partir de 1784, remercié par le comte d’Artois. Une marquise le soutiendra, à tout point de vue.

Et Marat attaque, avec violence, il vitupère dans ses écrits :

Newton d’abord est une cible de choix : il remet en cause la théorie des couleurs de Newton qui un siècle plus tôt a pu avancer sur la réfraction de la lumière à travers un prisme. Ceci débouchera sur la théorie de la nature ondulatoire de la lumière au début du 19ème siècle. Marat remet en cause le principe même de l’emploi des formules mathématiques par Newton et de leur caractère universel. Et tente une explication de la réfraction par la « périoptrique » s’appuyant sur une hypothèse, erronée celle-là, de Newton sur la nature corpusculaire et massique de la lumière. (On sait depuis que les photons sont sans masse). La réalité est plus prosaïque : Marat ne comprend pas les formules mathématiques.

Mais sa cible de choix est l’Académie des sciences créée par Colbert 120 ans plus tôt. Ses diatribes fustigent la « science officielle » et les « fripons » qui la peuplent ou l’entourent, en vrac Voltaire, d’Alembert, Diderot, Condorcet, Laplace, Lavoisier surtout, traité de « coryphée des charlatans ». Il n’hésite pas à faire des attaques personnelles. Voltaire répondra sèchement qu’il voudrait bien voir le « suc nerveux » prétendument découvert par Marat et assurant la communication entre le corps et l’âme…

Et Marat verse dans la théorie du complot des philosophes contre lui. Dès 1783 il s’en prend aux Lumières : « S’ils viennent un jour à concevoir des projets ambitieux, à porter leurs vues sur les affaires politiques, au moyen de leurs créatures bientôt instruites de tout ce qui se passe dans les cabinets, qui pourra les empêcher d’agiter les gouvernements, de bouleverser les Etats ? » Comme c’est bien dit …

Seul Rousseau est épargné, et pour cause : leur vision des sciences est quasiment la même : intuition géniale, la science est le fait des génies forcément seuls. Rousseau confond astronomie et astrologie, considère la physique comme une vaine curiosité, les mathématiques étant nées de l’avarice … La science pour lui (aussi) est avant tout celle de l’observation, lui qui est botaniste et non de la science expérimentale naissante à cette époque.

Alexandre Moati, chez qui j’ai puisé une partie de mes informations, propose 3 caractéristiques des postures de l’alterscience:

- Opposition à la science de ses contemporains, seul contre tous, génie face aux charlatans et aux conformistes

- Elaboration de constructions théoriques à l’appui d’une idée, d’une idéologie ou d’un dogme

- Violence du discours, qui passe de la virulence à la vitupération, alimentée par le ressentiment et le besoin de reconnaissance, théorie du complot, appel à la violence.

On imagine sans peine que ceux qui sont atteints de ce mal - certains parlent de plus en plus de pathologie – sont nombreux. Sont-ils de plus en plus nombreux et réellement dangereux ? Oui 3 fois oui !

Je voudrais vous en convaincre par un petit tour d’horizon et donner quelques cas où s’épanouissent de telles postures

Passons sur Auguste Comte et Saint Simon qui refusaient toute idée de mécanique ondulatoire de la lumière en opposition comme Marat à l’institution scientifique

Mais il peut y avoir aussi des cas à la fois cocasses et pitoyables, lorsque des ingénieurs ou même des scientifiques se lancent dans la construction de théories alternatives. Je voudrais évoqué Alain de Villegas et Aldo Bonassoli. Je crains qu’ici peu d’entre vous s’en souvienne… Mais si je vous parle des avions renifleurs de pétrole de Elf, votre mémoire va revenir …. Voici 35ans ces deux illusionnistes enfumèrent la direction de Elf pour rechercher et trouver du pétrole. Le premier est surtout un idéaliste tiers-mondiste « anti tout ». Le second a une formation de technicien en électricité, qui va adhérer à la théorie « psychobiophysique » impliquant l’éther comme reliant tous les phénomènes et qui s’oppose à la relativité d’Einstein. Il n’hésite pas à inventer une nouvelle particule, l’aldino , en toute modestie. Cette particule peut pénétrer à des km sous terre et revenir porteuse d’informations sur la nature du sous-sol. Tout cela visible par imagerie, domaine de prédilection de Bonassoli. De Villegas a assuré la promotion de tout cela d’abord auprès de la direction générale, puis Bonassoli a réussi à convaincre les ingénieurs d’Elf, tout polytechniciens qu’ils étaient, par le caractère innovant du procédé. Sans même tenter de recouper les sources, aussi bien les géologues que les physiciens ne se sont pas rendu compte qu’une nouvelle théorie physique ne pouvait émerger aussi facilement ! Les deux compères exigeaient le secret pour protéger leur invention. Ils déposèrent d’ailleurs un pli à l’Académie des sciences, pratique désuète mais classique pour ceux qui sont en quête de reconnaissance : les chercheurs au contraire publient un article scientifique et en même temps dépose une enveloppe à l’INPI. Les ingénieurs d’Elf furent même atteints d’autosuggestion, ayant le sentiment de participer à l’émergence d’une découverte… Au-delà des milliards investis et perdus, il faut noter les conséquences sur l’opinion publique quant au doute sur la science, accru par le secret maintenu pendant 5 ans sur l’affaire avant que n’éclate le scandale en 1983.

A cette époque Internet n’est pas encore répandu comme maintenant .

Son développement depuis la fin des années 90 va se révéler être une aubaine pour les concepteurs de théories aussi alternatives que fumeuses : ils peuvent se faire connaitre du grand public, donner corps à la réalité de leurs idées, n’ayant pas la possibilité de publier dans les revues scientifiques à comité de lecture , forcément « noyautées par les lobbies ».

On y trouve donc de tout. Comme la théorie synergétique d’énergie libre de René Louis Vallée qui revisite la formule E=mc² et s’oppose à la relativité d’Einstein . Avec un relent antisémite et forcément complotiste,

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