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Les utopies

Par   •  2 Décembre 2018  •  2 043 Mots (9 Pages)  •  601 Vues

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importante, et devient même une insulte de la part des conservateurs face à certaines mesures considérées comme « utopiques ». Le mot va petit à petit disparaître au début du XXème pour réapparaitre sous une forme nouvelle : la science-fiction, qui constitue une utopie d’un genre très particulier, car elle le limite à 3 niveaux. Premièrement, on retrouve dans les ouvrages de science fiction une projection dans le futur : la temporalité est valorisée. Pourtant, les utopies ne sont pas que dans le futur et sont présentées comme actuelles (ou passées), on assiste pas à une réduction du registre temporel. Ensuite, les ouvrages de SF amènent au prophétisme, même dans le prospectif : ils nous disent de quoi sera fait le futur à parties de ce que l’on sait d’aujourd’hui, notamment à partir des innovations scientifiques contemporaines. Les utopies ne prétendent pas savoir de quoi sera fait le futur : il n’y existe pas, puisque le futur est une répétition à l’infini de l’instant présent, puisqu’il est parfait. Enfin, il y a dans la SF une variable déterminante, le moteur de la société : la science et la technique, qui conditionnent l’évolution de la société (déterminisme technique). Dans les utopies, la science est rarement valorisée.

Ouvrage : Les utopies, Eric LETONTURIER

H. G. Wells estime que « la sociologie consiste à fabriquer des utopies ». Cette citation peut être assez choquante pour la sociologie actuelle, car elle ne prend pas en compte tout l’appareil méthodologique de la discipline méthodologique, permettant une objectivation des faits étudiés.

Les socialistes utopistes (Fourier, Cabet, Owen, St Simon) sont considérés comme des « grands-pères » de la sociologie. Simon écrit un ouvrage où il propose une constitution fondée de savants. Fourier a proposé les fameux phalanstères (les ancêtres des coopératives, on vivait en communauté et on y travaillait). Cabet propose une utopie qui s’appelle Icarie, démocratie absolue om l’inégalité n’existe pas. Owen, philanthrope industriel, imagine une société qu’il appelle « new harmony » dans laquelle il défend l’idée d’un partage total du capital et du travail entre ouvriers et patrons.

Ces auteurs et leurs productions ont donné lieu à des réalisations : ces beaux projets ne sont pas juste théoriques mais ont donné lieu à des réalisations. Cabet est par exemple parti aux USA où il a fondu une communauté icarienne.

L’utopie n’est donc pas que littérature, mais qu’elle a donné lieu à des réalisations authentiques qui ont malheureusement au fil du temps échoué.

Gabriel Tarde était à son époque un sociologue très reconnu et a écrit deux utopies. La première est l’utopie des « Géants chauves » : il s’agit d’une fiction qui vise à critiquer une théorie à l’époque très dominante et à la mode soutenue par l’italien Lombroso, affirmant que le criminel nait en tant que tel, et qu’il suffit de regarder la forme du crâne pour trouver les indicateurs de criminalité. Tarde défend l’idée qu’il y a des raisons et contextes sociaux qui vont expliquer que certains individus soient amenés à la criminalité : on ne nait pas criminel, mais on le devient, la déviance est donc un construit social. Avec son utopie, il cherche à diffuser plus largement ses idées à travers un roman, ce qui était difficile sous une forme purement théorique.

Sa deuxième utopie s’appelle « Fragment d’histoire future » : on y retrouve la mise en scène de concepts, notamment celui de la socialisation par l’imitation. Il y montre ainsi une société qui vit sous terre, portrait d’une société de la communication avant l’heure, c’est-à-dire qui fête en permanence les idées, les pensées, et où le lien social ne se crée pas par contrainte, mais par diffusion des idées, par influence des uns sur les autres (opposé à Durkheim).

Henri Mendras va beaucoup s’intéresser à la classe moyenne. Il est également très connu pour son ouvrage La fin des paysans, et à ses études sur l’exode rural et à ses conséquences. Pour diffuser ses idées, il va écrire en 1979 l’ouvrage Voyage en pays de l’utopie rustique dans lequel il montre par la fiction la fiabilité d’un projet de société autre que celui qui nous est proposé, c’est-à-dire une société dans lequel la civilisation et la modernité technique n’excluent pas du tout la ruralité, la proximité avec la terre. Il va développer là-dessus que société moderne ne rime pas forcément avec société urbaine, notamment en appuyant l’idée qu’il est bon d’alterner activités intellectuelles et activités manuelles, que la polyvalence professionnelle est importante. Il va également proposer un nouveau modèle politique, celui de l’autogestion, où chacun se gouverne par lui-même, se prend en charge : une société fondée sur la famille « souche » avec toutes les vertus que cela a pour le lien social.

De tous les temps, les utopies ont donc inspiré les sociologues. Une fois constaté ça, cela ne justifie pas le fait de s’intéresser aux utopies et de faire une sociologie politique des utopies, alors qu’on a déjà assez à faire sur la sociologie politique des sociétés réelles.

Pourquoi s’intéresser à ces utopies ? Pour répondre à cette question, il faut reprendre ce que l’on entend par « sociologie politique ». D’abord, il s’agira de faire un élargissement ou plutôt un retour aux origines, à l’étymologie : sociologie de la « polis », de la cité. En effet au fondement de l’utopie, il y a une question : comment construire au mieux la cité ? Cela amène plusieurs conséquences : tout d’abord, ça suppose la référence à un modèle. Il y a dans l’intention de l’utopie un modèle idéal, que l’on va chercher à transposer à la société sur la réalité. L’utopiste, lorsqu’il démarre la rédaction d’une utopie, cherche des idées et des idéaux pour les traduire à la réalité. Il va s’agir ici de dégager les sources de ces idéaux, qui peuvent changer selon les époques : l’utopiste invente son utopie toujours à partir de la société qui est la sienne. La société changeant, les intentions peuvent être en effet différentes selon les périodes. La volonté de construire au mieux la cité signifie qu’elle ne satisfait pas telle qu’elle est : il y a ainsi une dimension critique, la volonté d’une réforme de la société telle qu’elle est dans la réalité. On approche ainsi l’essence même de l’utopie : c’est une réponse théorique (ouvrage, écrit) à un réel social qui est jugé insatisfaisant par rapport à un modèle

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