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Une société sans religion est un navire sans boussole

Par   •  17 Mai 2018  •  3 142 Mots (13 Pages)  •  698 Vues

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peuple. Son impact en sort alors grandi, touchant au jugement des individus par leurs propres actions et décisions. En effet la religion est très proche de la notion de morale, dont elle s’est accaparée afin de juger les actions et faits à travers le prisme dogmatique que nous évoquions en introduction. Pour compléter l’allocution de Napoléon Bonaparte citée en introduction, nous y ajouterons la citation de CHATEAUBRIAND, qui eut à ce sujet cette phrase : « La morale naît de la religion ». Morale et religion semblent donc très proches, en cela que la religion énonce ce qui est mal (l’exemple des péchés capitaux selon le catholicisme) ou encore énonce le comportement et les mœurs à adopter au quotidien (largement développés dans la Charia musulmane par exemple). En affirmant son emprise sur la société en y énonçant ses lois et surtout en y imposant sa morale dont elle détient le monopôle, la religion semble bien s’ériger en boussole du vaisseau qu’est la société selon les dires de Napoléon Ier, en cela qu’elle en assure un facteur identitaire, d’homogénéité, et en oriente les mœurs selon son gré, grâce à sa main mise sur la morale et le jugement individuel.

La nécessité de la religion à la société, qu’illustre Honoré de BALZAC dans son affirmation extraite du Catéchisme social « Une société d’athées inventerait aussitôt une religion » ne s’arrête cependant pas à la simple reconnaissance de celle-ci en tant que telle et porteuse de morale : si Napoléon la compare à une boussole, c’est bien que la religion accomplit un rôle de réelle orientation, notamment sur le long terme, que nous développerons dans une seconde sous-partie.

B. La religion oriente et guide la société sur le long terme :

Marcel MAUSS, dans son Essai sur le don, qualifie la religion de « fait social total ». Il expose ici le caractère englobant de la religion sur l’individu et par extension de la société à travers le raisonnement suivant. La religion, avec ses capacités identitaires et par son rôle d’action sur la morale précédemment évoqué qui lui confère une sorte de « monopôle de la vérité », opère en influençant les pratiques et choix individuels. Dictant le quotidien et les choix de chacun, la religion devient déjà politique, la décision sociopolitique individuelle se fait sous son joug. La religion est donc omniprésente dans les différentes prises de décisions qu’elles soient sociales ou politiques, et prises par les dominants ou les dominés. Elle est ainsi prépondérante dans les décisions sociopolitiques de grande échelle (par sa maîtrise de décisions individuelles) telles que la conception du pouvoir politique mais aussi l’obéissance civile qui y fait écho ou encore la paix civile autour de ce que l’on appelle le « consensus religieux », théorie selon laquelle l’existence d’une religion, et avec elle une morale,, communes, est facteur de paix et consensus en cas de discorde.

Ainsi il semble que les sociétés disposant d’une religion sont structurées politiquement et moralement par celle-ci, qui va jusqu’à englober le réel et toucher tous les secteurs de la société. Ce phénomène rend le fait religieux omniprésent et enraciné dans la société, qui sont deux conditions chères à l’économiste Paul PIERSON, pour l’application de sa théorie de « dépendance au sentier ». Il s’agit-là de démontrer qu’une fois un phénomène (ici la religion) est enraciné durablement dans la société se crée une nouvelle influence de celui-ci sur les mœurs sociétaux : de façon consciente ou non, un fait enraciné perdure dans l’influence des mœurs sur le long terme. La morale religieuse et son emprise sur la conception de la politique notamment perdureraient ainsi au fil des générations par « habitude », de par l’enracinement de la religion dans les mœurs et conceptions passées. On aborde ainsi un nouvel aspect du lien entre religion et société : la religion guide et influence l’évolution des sociétés de par son emprise passée, par phénomène d’habitude et tradition. Il s’agit de la continuité de la religion et de son impact sur la société, qui semble un aspect essentiel de la relation entre les deux concepts étudiés. Par ailleurs, cette continuité fut analysée et expliquée par le philosophe roumain Emil CIORAN, qui en donnait cette explication : « c’est le degré d’inhumanité de la religion qui en garantit la force et la durée ».

Dans ce premier axe, nous avons tout d’abord vu comment la religion arbore des capacités de vecteurs identitaire, d’homogénéité et porteur de morale que la société nécessite pour s’affirmer en tant que telle, mais que la religion va même plus loin en s’érigeant comme véritable guide orientant la société de par son omniprésence et son enracinement, qui lui confère une influence sociopolitique sur le long terme.

II. Un moyen d’orientation qui semble souffrir de la modernité :

Dans ce second axe, nous verrons comment le passage les sociétés contemporaines semble mettre à mal la religion au sens où l’entendait Napoléon Ier, notamment par des évolutions sociétales et religieuses au rythme différent (A) puis nous verrons comment la religion cède le pas à de « nouvelles boussoles » pour orienter et guider le vaisseau de la société (B).

A. Le rôle de la religion mis à mal par la modernité et l’évolution de la société :

Saint Matthieu avait, le premier, ces mots : « Rendez à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu ». En énonçant le premier un pouvoir ne relevant pas de l’autorité divine, que l’on qualifiera de pouvoir politique, il est le précurseur de la thèse de séparation des pouvoirs, chère à MONTESQUIEU, mais aussi d’une forme, bien que minime dans ses paroles, de sécularisation. Ce phénomène désigne la séparation des sociétés civile et religieuse, et ainsi l’émancipation de la société de sa « boussole » originelle pour reprendre les termes de Napoléon Bonaparte. Ce phénomène fut appréciable en Occident et toucha son apogée au début du 20ème siècle, avec la mise en vigueur de la loi de séparation de l’Eglise et de l’Etat, du 9 décembre 1905, suite au rapport d’Aristide Briand. Cette loi résulte d’évolutions religieuse et sociétale différentes, avec la naissance de mouvement s’insurgeant de l’emprise précédemment expliquée de la religion sur la sphère publique. Nous pouvons à ce titre citer l’anticléricalisme, qui reproche notamment à la religion son côté « archaïque ». Le rejet de la religion pour la sphère sociétale

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