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LIEN PRECOCE MERE-ENFANT ET CONSTRUCTION DE LA VIE PSYCHIQUE

Par   •  18 Septembre 2017  •  3 659 Mots (15 Pages)  •  696 Vues

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En synthèse, il semble aujourd’hui acquis que si l’objet primaire répond de manière adaptée aux désirs du bébé, ce dernier est heureux, sécurisé. Cela lui permet d’organiser ses pulsions et l’encourage à donner de plus en plus de signes extérieurs, à grandir, à prendre goût à la vie. Mais si l’objet est triste ou froid, le bébé sera déprimé, désorganisé, angoissé et renverra de moins en moins de signes, jusqu’à ne plus rien demander. Cela fait des bébés très sages mais qui ont renoncé. Les petits d’homme sont donc marqués par les objets sur lesquels ils s’appuient, par leurs premiers liens avec leurs parents. C’est une empreinte. Plus tard, le plaisir qu’ils auront à prendre soin d’eux-mêmes, est dérivé du plaisir qu’ont eu leur environnement primaire à s’occuper d’eux. Ils peuvent s’écarter de l’objet en s’appuyant sur l’empreinte laissée en eux par leurs parents. C’est la condition nécessaire pour que se mette en place un auto-étayage, la construction de l’auto-érotisme qui s’appuie sur soi-même, son propre corps, sa pensée, ses fantasmes, à partir de toutes les expériences d’appui préalables intériorisées. Effet biologique (plaisir d’autoconservation et plaisir autoérotique) et plaisir de la rencontre avec l’objet s’amalgament, pour construire la sexualisation primaire de l’enfant.

- Position schizoparanoïde et ambivalence

Karl Abraham a proposé de subdiviser la phase orale en deux étapes : une première étape liée à l’activité de succion et une deuxième étape liée à la morsure (A. Brun et B. Chouvier, 2013). Il qualifie la première de phase pré-ambivalente, car le bébé ne peut pas, à son sens, avoir l’idée que le sein, au sens de « mère-environnement » puisse être bon et mauvais à la fois. La deuxième étape commence au deuxième semestre de la vie, c’est la phase sadique-orale. Avec l’apparition des dents, la saisie orale n’est plus une simple succion mais un mordillement, voire une morsure. Cette phase correspond d’après Abraham à l’apparition de l’ambivalence à l’égard de la mère, de l’objet. La mère devient à la fois objet d’Amour et de haine.

Mélanie Klein, à l’instar de Karl Abraham, postule qu’au départ, l’enfant ne perçoit pas la mère comme un objet unique, total, jusqu’à ce qu’il puisse accéder à l’ambivalence . Cette première phase, qu’elle qualifie de shizoparanoïde correspond à une organisation clivée du monde primaire, régie par la loi du Talion, et qui va être soit dans la violence en présence du mauvais objet, celui qui frustre ou qui menace, soit dans la plénitude en présence du bon objet celui qui répond, qui rassure (A. Brun et B. Chouvier, 2013). Le clivage de l’objet est également intériorié par le bébé dont le propre moi serait clivé entre une bonne et une mauvaise partie. Le bébé se déferait dans ces conditions de sa colère, en la projetant sur sa mère, tout en intériorisant ce qui est gratifiant dans sa relation à cet objet primaire. On parle d’identification projective. C’est dans cette phase que Mélanie Klein fait apparaître les fantasmes archaïques d’attaque, de morcellement du corps maternel et de son incorporation (angoisse de séparation, de morcellement, de dévoration, de mort). Le fantasme de l’attaque du sein consiste ainsi pour le bébé à vouloir tout s’approprier du sein, tout dévorer, détruire le sein pour s’approprier tout ce qui est bon. Mais il a également le fantasme que le sein va vouloir se venger, l’attaquer en retour. Il est alors important que la mère transforme cette destructivité par le jeu en un courant tendre, permettant au bébé de transformer les mauvaises parties de lui-même qu’il a projetées, et de les réintrojecter restaurées, pour servir à son développement. Bion (cité par le Comité éditorial du journal de la psychanalyse de l’enfant, 2012) souligne l’importance pour la mère de rester équilibrée « balanced », contenante, sous l’effet de l’identification projective, face à un bébé pris dans un système chaotique, soumis à des forces perturbatrices.

D’après Mélanie Klein, l’enfant sortirait de cette phase schizoparanoïde, par la position dépressive (A. Brun et B. Chouvier, 2013). Plus il multiplie les expériences avec le bon et le mauvais sein, plus il va réaliser qu’il s’agit du même, et appréhender sa mère comme un objet total. Si les relations gratifiantes avec le bon sein l’emportent, les pulsions de vie prendraient le dessus sur les pulsions de mort et le bébé pourrait introjecter de manière stable une mère aimante. Le clivage du moi du bébé s’estomperait également, de fait, progressivement. Découvrant l’ambivalence, il comprendrait alors qu’il peut avoir de bons et de mauvais sentiments. Il sortirait de l’angoisse de persécution pour entrer dans l’angoisse de perdre sa mère, du fait des attaques fantasmatiques qu’il lui fait subir. En position dépressive, l’enfant serait dans un désir de réparation de l’objet.

A la lumière des recherches effectuées en psychologie du développement, on sait aujourd’hui que le bébé est capable dès les premiers instants de reconnaitre sa mère, ce qui remet en question le clivage premier décrit par Karl Abraham et Mélanie Klein. On évoquerait plutôt le bébé en tant que nébuleuse subjective (A. Brun et B. Chouvier, 2013). Il n’est pas toujours attentif et passe par de nombreux états différents de manière chaotique, percevant un ensemble de sensations diverses et contradictoires non reliées entre elles. La difficulté pour lui serait de devoir faire la synthèse de ses ressentis, et c’est sa mère, attentive, empathique, équilibrée, qui, dans sa stabilité, va l’aider peu à peu à donner du sens à ses éprouvés corporels et psychiques (Bion, cité par le comité éditorial du Journal de la psychanalyse de l’enfant, 2012).

A. Brun et B. Chouvier (2013) soulignent ainsi que « les bébés connaissent d’abord des excitations pulsionnelles diffuses, avant que la pulsion, qui suppose une différence entre le sujet et l’objet, puisse s’organiser ».

4. Miroir primaire et enveloppe psychique

Il fallait pour Freud qu’une nouvelle action psychique vienne s’ajouter à l’auto-érotisme pour conduire au narcissisme et favoriser l’émergence du moi. Il va ainsi différencier la libido d’objet et la libido du moi en interaction l’une avec l’autre, dans une sorte de continuum : la libido narcissique peut se transformer en libido d’objet et cette dernière peut replier ses investissements sur le moi. A travers sa théorie du narcissisme,

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