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La notion d'acte créateur de droits

Par   •  26 Novembre 2018  •  3 156 Mots (13 Pages)  •  442 Vues

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Mais face à cette situation, dans le but de garantir une plus grande sécurité juridique aux bénéficiaires des décisions explicites créatrices de droits, à partir de 1997 le juge administratif a progressivement abandonnée la corrélation entre « délai de retrait » et « délai de recours contentieux ». Désormais, l'administration ne saurait se prévaloir du fait qu'elle a omis d'indiquer les voies et délais de recours contre une décision créatrice de droits, lors de sa notification, pour la retirer après l'expiration du délai de recours contentieux normalement applicable (CE, 24 octobre 1997, Mme de Laubier). Ceci a permis de rompre pour la première fois en matière de retrait de décisions explicites créatrices de droits le parallélisme existant jusqu'alors entre « délai de retrait » et « délai de recours », fragilisant ainsi le fondement même de la logique à l'oeuvre dans l'arrêt Dame Cachet. À noter que cette jurisprudence fut également motivée par le décret du 28 novembre 1983 qui cherche à renforcer les droits des administrés.

C'est l'arrêt Ternon, rendu par le CE le 26 octobre 2001 qui marque l'abandon de la jurisprudence Dame Cachet. Le CE, renonçant à se référer à la notion de délai de recours contentieux, a, en effet, indiqué que l'administration dispose d'un délai maximum de quatre mois à compter de l'adoption d'une décision explicite pour la retirer si elle est illégale. Attention tout de même, cette règle ayant trois exceptions. Tout d'abord, lorsque le retrait est sollicité par le bénéficiaire même de la décision créatrice de droits en vue d'obtenir l'édiction d'une décision nouvelle plus favorable et que le retrait n'est pas susceptible de porter atteinte aux droits des tiers, l'administration a la possibilité de faire droit à cette demande au-delà de quatre mois, y compris si la décision en cause n'est pas illégale (CE, 29 octobre 2003, Mme Meyer). Ensuite, si un texte, de nature législative ou réglementaire, fixe un délai de retrait différent, la jurisprudence Ternon ne peut s'appliquer. Le CE a également admis que l'instauration, par voie réglementaire, d'une procédure de recours hiérarchique contre la décision créatrice de droits justifiait le non-respect du délai de droit commun de quatre mois (CE, 28 septembre 2005, Société Soinne et associés). En revanche, l'exercice d'un recours administratif formé en l'absence de dispositions particulières le concernant n'a pas pour effet de permettre la remise en cause de la décision créatrice de droits plus de quatre mois après son adoption (CAA Nancy, 19 octobre 2006, Commune de Schiltigheim), pour le cas du recours gracieux formé par le préfet dans le cadre du contrôle de légalité, solution que le CE a confirmé dans un avis du 27 juin 2007, Mme Viaud. Et pour finir, la règle énoncée par l'arrêt Ternon constitue une règle de droit interne qui ne saurait être invoquée pour faire obstacle à la peine effectivité du droit communautaire. Et il n'est pas d'ordre public le moyen tiré de l'illégalité du retrait d'une décision créant des droits, faute pour l'administration d'avoir respecté les conditions posées par l'arrêt Ternon.

Les décisions expresses créatrices de droits ne sont pas les seuls actes créateurs de droits, on a aussi des décisions implicites créatrices de droits, qui sont désormais régies par la législation.

B/ La législation mettant un terme à la jurisprudence en place vis-à-vis du retrait des décisions implicites créatrices de droit

C'est la loi du 12 avril 2000 qui a mis un terme au régime issu de la jurisprudence Eve. Cet arrêt, rendu par le CE le 14 novembre 1969, énonce que l'administration n'est plus compétente pour procéder au retrait de l'acte une fois que le délai imparti pour se prononcer est expiré, quand un texte prévoit que le silence gardé par l'administration sur une demande dont elle est saisie fait naître une décision tacite d'acceptation. Ce principe est le premier à ne pas s'aligner sur la jurisprudence Dame Cachet, car il implique une déconnexion entre « délai de retrait » et « délai de recours contentieux ».

Or, même si ce régime permet une certaine stabilité des situations juridiques, il présente deux limites jurisprudentielles. Premièrement, lorsque la décision implicite d'acceptation avait fait l'objet d'une publicité, il était possible de la retirer aux conditions posées par l'arrêt Dame cachet (CE, 1er juin 1973, Ministre de l'équipement et du logement c/ Epoux Roulin), c'est-à-dire notamment jusqu'à l'expiration du délai de recours contentieux ou avant que le juge n'ait statué. Deuxièmement, la jurisprudence Eve ne trouvait pas à s'appliquer en cas de recours hiérarchique obligatoire prévu par un texte (CE, 1er février 1980, Ministre de la Santé et de la Famille c/ Clinique Ambroise-Paré). Toutefois, lorsque le délai accordé à l'autorité hiérarchique pour statuer sur le recours administratif était parvenu à son terme, tout retrait redevenait aussitôt impossible (CE, 1er avril 1992, Clinique des Maussins).

La loi du 12 avril 2000, aussi appelée DCRA, met en place un nouveau dispositif plus favorable à l'administration. Dans cette loi, on y voit le législateur confirmer la jurisprudence Epoux Rolin, mais il a aussi repris le principe de l'arrêt Dame Cachet, selon lequel le retrait d'une décision créatrice de droits reste possible aussi longtemps que celle-ci n'est pas à l'abri d'une annulation contentieuse. Si cette loi met fin à la jurisprudence Eve, c'est parce qu'elle autorise le retrait des autorisations tacites n'ayant fait l'objet d'aucune mesure d'information auprès des tiers dans les deux mois suivant leur naissance. Ceci a renforcé les droits de l'administration et non ceux des administratés, puisque l'administration voit les délais dont elle dispose rallongés de deux mois pour se prononcer sur les demandes dont elle est saisie.

Malgré toutes ces modifications au cour des dix dernières années concernant le retrait des actes administratifs créateurs de droits, le régime juridique entourant ce type d'acte reste peu satisfaisant, soumis à des reproches, alors que pourtant des solutions ont déjà été trouvées.

II Une distinction au sein du régime n'empêchant pas sa qualification de peu satisfaisant

Comme il l'est

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