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L'arrêt Tarn et Garonne

Par   •  29 Octobre 2018  •  2 014 Mots (9 Pages)  •  442 Vues

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Toutefois, cette jurisprudence devant concerner l'ensemble des contrats publics, qu'il s'agisse des marchés publics, des contrats de partenariats ou des délégations de service public, voire même des conventions d'occupation domaniale, le CE a posé un cadre strict pour limiter les recours abusifs.

II) Une jurisprudence encadrée

A) Un encadrement juridique précis

Cette nouvelle voie de recours doit en effet obéir à certaines conditions.

Au préalable, le tiers requérant doit être lésé dans ses intérêts de manière "suffisamment directe et certaine" par la passation du contrat ou par ses clauses. Ensuite, le tiers ne peut invoquer que "des vices en rapport direct avec l'intérêt lésé" dont il se prévaut ou "ceux d'une gravité telle que le juge devrait le relever d'office". De plus, la voie du recours contre les actes détachables ouverte par l’arrêt Martin (1905) précité, "devenue inutile", leur sera dorénavant fermée, a précisé la Haute Juridiction dans un communiqué du 4 avril ; « la légalité du choix du cocontractant, de la délibération autorisant la conclusion du contrat et de la décision de le signer, ne peut être contestée qu’à l’occasion du recours ainsi défini. » Ces dispositions visent manifestement à réduire le champ des moyens invocables afin que les contrats administratifs ne puissent être contestés à tout vent, en fonction de considération purement personnelle par exemple. Toutefois, alors que nous avons vu dans nos premiers développements que le CE anéantissait la distinction entre les tiers susceptibles de recourir en plein contentieux contre le contrat, une distinction nait au sein des tiers intéressés puisque le CE distingue les moyens invocables selon qu’il s’agisse d’un tiers lambda, ou d’un tiers élu. En effet, le recours « Tropic II » est également ouvert « aux membres de l’organe délibérant de la collectivité territoriale ou du groupement de collectivités territoriales concerné ainsi qu’au représentant de l’Etat dans le département dans l’exercice du contrôle de légalité » et ces derniers pourront invoquer tout moyen à l’appui de leurs recours. Pourquoi cette distinction ? Il semblerait que le CE distingue selon que les tiers intéressés représentent leurs intéressés personnels, ou l’intérêt général. Cette distinction va au delà des moyens invocables puisque le CE précise que la voie de recours contre les actes détachables est toujours ouverte au préfet tant que le contrat n’est pas signé.

Ensuite, le CE limite temporellement cette voie de recours ouverte à tous les tiers. En effet, elle n’est ouverte que « dans un délai de deux mois à compter de l'accomplissement des mesures de publicité appropriées. » Toutefois, beaucoup de questions se posent quant à l’accomplissement des mesures de publicités nécessaires pour que le délai commence à courir ; elles feront l’objet d’une étude dans le développement suivant.

Pour finir et comme il l’avait fait en 2007 pour l’arrêt « Tropic », le Conseil d’Etat n’applique pas cette jurisprudence au litige tranché en l’espèce, et limite l'ouverture aux nouveaux tiers de ce recours aux contrats dont la procédure de passation a été engagée postérieurement à la date de lecture de cette décision et ce dans un soucis de sécurité juridique (KPMG, 2006). En effet, alors que le principe est celui selon lequel il appartient au juge administratif de faire application de la règle jurisprudentielles nouvelle à l’ensemble des litiges, il a le pouvoir de moduler dans le temps les effets d’un changement de la règle jurisprudentielle en cas d’atteinte rétroactive au droit de recours, ou en cas de risque d’atteinte excessive aux relations contractuelles en cours. En l'espèce, la fermeture aux concurrents évincés de la passation d'un contrat administratif du recours contre les actes détachables préalables à cette passation, après la signature du contrat, a pour contrepartie l'ouverture aux intéressés d'un recours de pleine juridiction contre le contrat lui-même. Ainsi, les règles nouvelles, prises dans leur ensemble, n'apportent pas de limitation au droit fondamental qu'est le droit au recours. Mais toutefois eu égard à l’impératif de stabilité des relations contractuelles en cours, le CE décide, en l'espèce, que le recours de pleine juridiction ouvert aux concurrents évincés par sa décision ne pourra être exercé qu’à l’encontre des contrats dont la procédure de passation a été engagée postérieurement à la date de lecture de cette décision, sous la seule réserve des actions en justice ayant le même objet et déjà engagées avant cette même date.

Toutefois, cet encadrement juridique est-il suffisant ?

B) Un encadrement suffisant ?

La suffisance ou l’insuffisance de cet encadrement se pose notamment du point de vue de la sécurité juridique. Notamment, deux questions se posent. Le choix du CE quant à la publicité nécessaire pour faire courir le recours et la distinction au sein des tiers intéressés sont-ils judicieux ?

Le CE pose que le « recours doit être exercé, y compris si le contrat contesté est relatif à des travaux publics, dans un délai de deux mois à compter de l’accomplissement des mesures de publicité appropriées. » Pour beaucoup, assurer une publication pour chaque attribution de contrat constituerait un surcroit procédural là où en théorie des études et des missions sont menées pour les diminuer les procédures administratives. De plus, le CE n’explicite pas ce qu’il entend par mesures « appropriées » ; ainsi, le risque est que le délai ne court pas et que le contrat puisse toujours faire l’objet d’un recours. Une épée de Damoclès serait donc toujours au dessus de lui, pouvant le faire tomber à tout moment ; le principe de sécurité juridique s’en trouverait fortement affaibli. Pour Clémence Cordier, responsable du contentieux et associée au cabinet Earth Avocats, « il aurait pu être opportun pour limiter temporellement le champ du recours d’enfermer celui-ci, à l’instar de « Tropic », dans un délai de 6 mois en l’absence de mesures de publicité. » Toutefois, nul doute que le CE, soucieux de préserver la sécurité juridique, précisera sa pensée ultérieurement.

Pour finir, le CE, comme explicité précédemment, ne limite pas les moyens invocables par les élus à l’appui de leur recours ainsi, ils

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