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L'application de la jurisprudence dans le temps

Par   •  11 Janvier 2018  •  1 726 Mots (7 Pages)  •  907 Vues

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influencé par une autre juridiction.

— Toute décision de justice est rétroactive car le juge se prononce sur des faits antérieurs mais ce regard rétroactif se fait en principe selon la loi en vigueur au moment des faits dont est saisi le juge. Le changement de jurisprudence amplifie la rétroactivité puisqu’on apprécie des faits antérieurs en fonction d’une nouvelle règle de droit.

=> Par exemple, l’arrêt rendu par la première chambre civile de la Cour de cassation le 9 octobre 2001 vient préciser le devoir d’information tenu par un médecin.

En l’espèce en 1974, un médecin procède à l’accouchement d’une femme et l’enfant se présente par le siège. Le médecin n’avertit pas la femme des risques liés à l’accouchement par voie basse et ces risques se réalisent causant des traumatismes à l’enfant. Cet enfant devenu majeur décide de poursuivre en responsabilité le médecin accoucheur. 

Et l’enfant se fonde sur une jurisprudence de la cour de cassation du 17 octobre 1998 qui exige que le médecin donne une information adéquate au patient sur les risques graves mêmes s’ils se réalisent qu’exceptionnellement.

=> Cette décision du 17 octobre 1998 est un revirement de jurisprudence. Le juge du fond rejette la demande de l’enfant en estimant qu’au moment des faits c’est-à-dire en 1974, l’obligation d’information du médecin n’exigeait pas une information aussi détaillée. Donc pour le juge du fond la règle de droit jurisprudentielle applicable est celle énoncée par le juge au moment des faits litigieux. 

==> La cour de cassation a censuré cette décision, elle casse l’arrêt d’appel et elle énonce notamment que l’interprétation jurisprudentielle d’une même norme à un moment donné ne peut être différente selon l’époque des faits considérés et nul ne peut se prévaloir d’un droit acquis à une jurisprudence figée. 

II- les effets des décisions de jurisprudence dans le temps.

A- Le revirement de jurisprudence, source d’insécurité juridique.

— Pour la rétroactivité de la jurisprudence, on dit que la jurisprudence est meilleure que l’ancienne et que son application immédiate permet d’accélérer le progrès social. Cependant, le principe de sécurité juridique est touché : le justiciable qui se verrait appliquer un revirement de jurisprudence immédiate, il se situe dans une situation d’insécurité juridique. En vertu de ce principe, les juridictions nationales et internationales ont décidé de moduler dans le temps les effets de ses décisions de justice : la Cour de justice de l’Union Européenne a admis en 1976 qu’elle pouvait moduler les effets de sa jurisprudence, en 2004 la Cour de cassation et le Conseil d’Etat l’ont fait et le Conseil constitutionnel en 2008.

=> En modulant l’effet de leur jurisprudence, les institutions précisent que leur revirement de position parviendra à posteriori, c’est-à-dire en se fondant sur les faits constatés.

— Dans l’arrêt du 9 octobre 2001 énoncé précédemment et concernant le devoir d’information du médecin, ce dernier est effectivement placé dans une situation d’insécurité juridique. Le médecin ne pouvait pas prévoir en 1974 qu’il serait exposé à un revirement de jurisprudence. A l’époque la loi lui autorisait de ne pas donner des informations aux patients s’il estimait que ces risques étaient peu probables et exceptionnels.

B- Le revirement de jurisprudence, atteinte au principe de procès équitable.

— La rétroactivité de la jurisprudence trouve en effet ses limites, pour le plaideur qui en subit les conséquences, dans la préservation du droit d’accès à un juge compris dans la reconnaissance du droit à un procès équitable. La Cour de cassation peut ainsi décider de ne pas appliquer à l’affaire qui lui est soumise la règle jurisprudentielle nouvelle, dès lors que les effets de l’application du revirement sont de nature à priver le plaideur de l’accès au juge.

— L’arrêt de l’Assemblée plénière du 21 décembre 2006 rappelle le droit pour tout individu à un procès équitable.

En l’espèce, un journal avait publié en 1996 un article intitulé : « ils maltraitent leur bébé à Digne, le couple tortionnaire écroué ». L’une des personnes ainsi pointée du doigt a estimé que le journal avait méconnu le principe de présomption d’innocence, assignant donc la société éditrice du journal et le directeur de la publication en réparation de ce préjudice. Mais dans ce cas, la personne n’avait pas effectué les actes interruptifs de prescription tous les 3 mois en cour de procédure qu’elle était tenu de respecter en vertu d’une jurisprudence de la cour de cassation de 2004 et donc postérieure à l’introduction de sa demande en réparation.

==> La cour de cassation confirme sa jurisprudence de 2004 mais en précisant que celle-ci ne s’applique pas dans ce cas et pour justifier cela, elle va énoncer la solution suivante  « l’application immédiate de cette règle de prescription dans l’instance en cour aboutirait à priver la victime d’un procès équitable au sens de l’article 6 paragraphe 1 de la convention européenne des droits de l’homme en lui interdisant l’accès au juge ». 

— Les revirements progressifs ou graduels de la jurisprudence sont une solution pour respecter le principe de procès équitable.

En effet, la juridiction va progressivement modifier sa position par la méthode dite des « petits pas ». La Cour de cassation passe par des arrêts annonciateurs et indique qu’elle va prochainement changer de position.

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