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Dissertation sur l'étranger

Par   •  14 Septembre 2018  •  6 336 Mots (26 Pages)  •  348 Vues

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En effet, après avoir participé à la naissance du droit commercial, les étrangers ont vu l’exercice de leur activité commerciale sur le territoire national soumis à de nombreuses restrictions (I). Toutefois, il est possible de noter aujourd’hui une tendance à l’ouverture et à l’accessibilité de la pratique du commerce par les étrangers en France (II).

I. Les commerçants étrangers : des professionnels soumis à de nombreuses conditions et restrictions dans l’exercice de leur activité commerciale

Les commerçants étrangers sont des professionnels soumis à des conditions et restrictions dans l’exercice de leur activité. Les restrictions législatives quant à la profession commerciale de l’étranger qui prennent en compte le critère de la résidence et de la nationalité apparaissent dès 1880 (A). Depuis, les étrangers ont un accès restreint à la profession du commerçant et à ses droits (B).

A. Les années 1880-1919 : l’origine des restrictions législatives quant à la profession commerciale de l’étranger

Les années 1880-1919 voient la mise en place d'une série de restrictions à la liberté d'établissement des étrangers visant certains secteurs professionnels jugés « particulièrement sensibles ». Elles s'inscrivent dans une logique administrative de police des étrangers, qui participe de la politique d'intégration nationale mise en place par la IIIème République. Les principes qui guident les premières mesures de distinction nationale dans le monde du commerce relèvent d'une logique policière. Au XIXème siècle, la grande majorité des professions commerciales ne distinguent pas les Français des étrangers. Les premières mesures discriminatoires datent des années 1880 pendant la Grande dépression, vaste crise économique qui suscite des tensions entre Français et étrangers. Les dispositions adoptées dès 1881 pour fermer l’accès de certaines professions aux étrangers restent cantonnées à certains secteurs du monde de l’entreprise. La loi du 29 juillet 1881 exige des gérants de journaux la nationalité française. À partir de 1898, le droit de s’établir comme pharmacien est régi par le principe de réciprocité. Le législateur écarte ensuite les étrangers de la direction ou du service des cercles et des casinos. Ces restrictions et interdictions professionnelles criminalisent l’étranger (le jeu, la drogue, la politique) pour légitimer la politique de différenciation nationale. La loi du 16 juillet 1912 exclut les étrangers des « forains » et réglemente l’exercice d’un commerce ambulant selon le critère de la nationalité. La Première guerre mondiale constitue une rupture dans les logiques d’identification. La loi du 9 novembre 1915 restreint la liberté de faire le commerce quant à l’ouverture de débits de boissons par des étrangers : les étrangers ne sont plus visés en tant que criminels potentiels ou agitateurs politiques, mais en tant que commerçants. Le Registre du commerce est d’ailleurs institué en France par la loi du 18 mars 1919, proposition déposée le 17 octobre 1916 et légitimée par la logique de différenciation nationale de la IIIème République : la défense de la nation passe par la « protection » du marché du travail contre les étrangers. Au long des années 1930, les organisations commerçantes et artisanales développent des arguments contre la « concurrence déloyale des étrangers ». Après les circulaires du Ministère du commerce du 6 novembre 1934 et du 18 janvier 1935 pour empêcher l’établissement d’entrepreneurs étrangers sur le territoire, le décret-loi du 9 août 1935, ayant pour objectif de « protéger les artisans français contre la concurrence des artisans étrangers », soumet les artisans au même régime que les salariés étrangers et limite le nombre d’étrangers dans l’artisanat. Ainsi, les artisans doivent être détenteurs d’une carte d’identité d’étranger portant la mention « artisan », ce qui demande une autorisation préfectorale. S’agissant des commerçants étrangers, le décret-loi du 17 juin 1938 veut « assurer la protection du commerce français » en réglementant l’admission des étrangers à une profession commerciale. Par suite, le décret-loi du 12 novembre 1938 renforce ces mesures en interdisant à tout étranger l’exercice sur le territoire français d’une profession commerciale ou industrielle s’il ne possède par une carte d’identité spéciale portant la mention « commerçant » et délivrée par le préfet du département où l’étranger exerce son activité. La volonté de limiter la liberté d’établissement des étrangers joue un rôle central dans les pratiques administratives de l’attribution des cartes de commerçants étrangers. Elle permet de légitimer une intervention de l'État de plus en plus importante dans le secteur des professions indépendantes. L'institution d'une carte de commerçant étranger participe ainsi au mouvement d'institutionnalisation et de professionnalisation de la catégorie « commerçant ». À compter de 1938, tous les entrepreneurs étrangers sont contraints de demander la délivrance de la carte d'artisan ou de commerçant étranger. Ces deux catégories doivent être affinées, précisées et justifiées. Les étrangers jouent un rôle clé dans ce processus de différenciation. L'essentiel de la correspondance entre le ministère de l'Intérieur, le ministère du Commerce et les autorités préfectorales tourne autour des difficultés d'appréciation de la nature de la profession exercée, difficultés qui supprimeront la carte d'artisan en 1941. Depuis, la naissance de l’Union européenne a amené quelques garanties. Ainsi, le droit originaire, ou droit des traités, consacre cinq libertés : la liberté de prestation de services, la liberté d’établissement et les libertés de circulation des personnes, des capitaux et des marchandises. Les traités ont ensuite créé des institutions européennes qui créent du droit dérivé pour rendre effectives ces libertés, grâce aux règlements, directement applicables, et aux directives, qui fixent les objectifs à atteindre et qui laissent aux gouvernements le soin de les appliquer par une transposition en droit interne dans un certain délai. La liberté de prestation de services, au cœur du débat de la directive Bolkestein adoptée le 12 décembre 2006, cherche à supprimer toutes les restrictions entravant la possibilité pour un ressortissant d’un État membre, établi dans un pays de l’Union européenne, d’accomplir certains actes de l’activité professionnelle non salariée qu’il exerce au bénéfice d’un client se trouvant

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