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La Vème République est-elle un régime de rupture ?

Par   •  28 Février 2018  •  3 247 Mots (13 Pages)  •  766 Vues

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Le projet de constitution est également soumis à des conditions concernant son contenu.

Ensuite, étudions les conditions de fond.

La loi du 3 Juin 1958 impose au projet de Constitution de respecter cinq principes, qui résultent d’un accord entre le gouvernement de De Gaulle et les assemblées parlementaires.

Tout d’abord la responsabilité du gouvernement devant le parlement. Cette condition exclut évidemment la possibilité d’établir un régime présidentiel. Elle traduit une volonté de continuité dans la tradition parlementaire française qui, malgré les propositions de régime présidentiel par de grands juristes tels que George Vedel ou Maurice Duverger, semble être le régime le plus adapté à la France.

Cependant la loi ne dit pas que la responsabilité doit être égale devant les deux chambres, les attributions politiques appartiennent à l‘Assemblée nationale alors que le Sénat se limite a son rôle législatif. En ce sens, la nouvelle constitution se place dans la continuité de celle de la IVème République. La responsabilité n’est pas non plus quotidienne et illimitée, elle est encadrée par des règles précises de procédure afin d’éviter les risques d’instabilité. En ce sens, la constitution de la Vème république innove et tire les conséquences des erreurs des précédents régimes.

D’autre part, la loi prévoit que « seul le suffrage universel est la source de pouvoir ».

L’élection du chef de l’Etat par le suffrage universel constitue une rupture extrêmement importante avec la constitution de la IVème république puisqu’elle vient renforcer la légitimité de l’exécutif et donc permettre d’augmenter son pouvoir. Néanmoins le président n’est pas élu au suffrage universel direct mais par un collège électoral prévu par la constitution. Cette élection au suffrage universel concerne aussi bien le pouvoir exécutif que législatif. Ainsi les députés sont élus au Suffrage universel direct et les sénateurs par des collectivités électorales. Cette organisation électorale est mise en place par des lois électorales qui sont extérieures à la constitution, mais qui lui sont évidemment conformes. Selon Michel Debré, sur ce point, les « règles de la démocratie française sont donc maintenues ». La Constitution reste dans la tradition républicaine, dans les règles fondamentales de la démocratie française. De plus, la loi du 3 juin précise que « le pouvoir législatif dérive du suffrage universel ou des instances élues par lui ». Le parlement veut écarter l’idée d’une seconde chambre où siégerait des représentants non élus, et qui plus est représentants d’organisations économiques, sociales et culturelles. C’est ce qui avait été proposé lors du discours de Bayeux en 1946.

Un autre point de la loi du 3 Juin 1958 porte sur l’organisation de la justice, « l’autorité judiciaire doit demeurer indépendante » . Cette condition apparait comme une condition nécessaire pour assurer le respect des libertés fondamentales, c’est-à-dire celles prévues par le préambule de 1946 et la DDHC de 1789. Cependant ce contrôle du respect des libertés n’est confié qu’à l’autorité judiciaire et non au conseil constitutionnel, organe qui sera également institué par la Constitution de 1958. Ce principe manifeste la volonté de la commission de garantir le maintien des libertés fondamentales et donc d’instaurer un régime démocratique, conforme aux valeurs de la France depuis 1789. Cela permet également de garantir le régime contre la possibilité d’une dictature.

La loi du 3 Juin 1958 précise également que « le pouvoir exécutif et législatif doivent être effectivement séparés » . Selon Michel Debré, même si le dogme de la séparation des pouvoirs est dépassé, il faut que les fonctions essentielles du pouvoir soient divisées si l’on veut éviter l’arbitraire et la dictature, associer liberté et autorité. Cette condition constitue une rupture avec les constitutions précédentes, puisque la constitution doit établir pour la première fois une distinction nette entre les autorités et l’origine de leurs pouvoirs, la constitution organise également leur collaboration pour réaliser une unité de pensée et d’action. Chaque pouvoir assume sa propre responsabilité. Cette séparation est envisagée par De Gaulle dans un sens organique : le gouvernement ne procède pas du parlement mais du chef de l’Etat. Cela permet de renforcer d’autant plus le pouvoir de l’exécutif, et donc de rééquilibrer les rapports entre les institutions. C’est l’affirmation d’un principe lié au caractère démocratique du régime. De Gaulle considère également que cette condition consacre une incompatibilité des fonctions ministérielles et parlementaires, ce qui met fin aux risques d‘instabilité ministérielle et à une partie de la prépondérance du parlement. Or la formulation est ambigüe puisque pour le parlement, cette condition avait pour objectif de voir conserver les pouvoirs du parlement, de maintenir une part de leurs prérogatives.

Enfin selon la loi du 3 Juin, la constitution doit permettre d’organiser les rapports de la République avec les peuples qui lui sont associés. La condition fait référence ici aux peuples d’Afrique noire, aux pays colonisés par la France qui étaient déjà en partie engagés dans la décolonisation. La république doit accompagner la décolonisation de ces pays et organiser les nouveaux rapports qui vont résulter de ces processus.

La loi du 3 Juin 1958 permet donc en apparence de concilier les volontés du parlement, c’est-à-dire un certain respect de la tradition parlementaire et démocratique, avec les nouvelles exigences de De Gaulle pour un exécutif plus fort. En réalité, le général De Gaulle va disposer d’une relative liberté dans la rédaction de sa constitution, ce qui va aboutir à la création d’un régime parlementaire de type nouveau. Quelles sont les caractéristiques de ce régime ?

Dans une seconde partie, nous allons étudier la constitution de 1958 : une rénovation de la tradition pour l’établissement d’un régime parlementaire de type nouveau. La première sous-partie sera la tradition parlementaire française et la seconde sous-partie sera le régime parlementaire de type nouveau.

D'abord, étudions la tradition parlementaire française.

Michel Debré, dans son discours devant le conseil d’Etat le 27 aout 1958, affirme que le gouvernement, par le biais de la nouvelle constitution, « a voulu rénover le régime

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