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Commentaire Civ. 3, 15 décembre 2010 (vileté du prix)

Par   •  3 Juillet 2018  •  1 697 Mots (7 Pages)  •  713 Vues

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d’abord l’action en rescision est limitée au vendeur dans les cas de ventes d’immeubles, de vente d’engrais, de cession de droits d’auteur, de vente de produit agricole ou de pêche en situation de crise conjoncturelle, alors que l’action en nullité de la vente peut être dirigée contre toute vente.

D’autre part l’action en rescision est en outre soumise à un régime de preuve spécifique et rigoureux : le vendeur doit établir l’existence d’une présomption de lésion (art. 1677 du Code civil), la preuve de la lésion ne peut ensuite être faite devant les juges que par un rapport établi par trois experts concluant majoritairement, au caractère lésionnaire de la vente (art. 1678 et suivants).

De plus, alors que l’action en nullité, par son effet rétroactif, dépossède irrémédiablement l’acquéreur, la seconde offre à ce dernier la possibilité de garder l’immeuble en payant le supplément du juste prix (C. civ. art. 1681). Sur le plan procédural, également, la substitution en cause d’appel de l’action en nullité pour vileté du prix à l’action en rescision pour lésion introduite en première instance sera considérée comme une demande nouvelle (Cass. com., 29 juin 1948, Cass. 3e civ., 19 déc. 1977), tandis que le jugement qui déboute le demandeur d’une action en rescision n’aura pas l’autorité de la chose jugée à l’égard d’une action postérieure en nullité de la vente pour vileté du prix (Cass. 1re civ., 28 avr. 1958).

Mais L’enjeu réside surtout dans le délai pour agir : deux ans seulement à compter de la rencontre des volontés s’il s’agit de lésion et cinq ans (délai de droit commun) pour une action fondée sur un prix dérisoire. On peut d’ailleurs remarquer que le délai enfermant l’action en rescision est qualifié par la Cour de cassation de délai de prescription alors même qu’elle juge depuis près de soixante ans qu’il s’agit d’un délai de forclusion (ou préfix) ne pouvant être ni interrompu ni suspendu.

Ainsi, si la distinction entre l’action en nullité pour vileté du prix et l’action en rescision pour lésion semble tout à fait juste et compréhensible au regard de leurs différents régimes, la troisième chambre civile entend ici réaffirmer l’autonomie de la nullité pour vileté du prix.

II- Autonomie consacrée de la nullité pour vileté du prix

Grâce à cette distinction faite entre l’action en nullité pour vileté du prix de l’action en rescision pour lésion, la troisième chambre civile de la Cour de Cassation permet l’affirmation du principe d’autonomie (A’), même s’il l’on peut toujours s’interroger aujourd’hui quand à la nature de la nullité pour vileté du prix (B’)

A’) Affirmation du principe d’autonomie

Dans cet arrêt, la troisième chambre civile de la Cour de Cassation entend véritablement affirmer la séparation entre les 2 notions, et consacrer le principe d’autonomie de la vileté du prix.

La cour d’appel avait violé les articles 1591 et 1676 du code civil en soumettant la demande en nullité de la vente au délai de deux ans prévu pour les actions en rescision pour cause de lésion. Or, selon l’ancien article 1304 du code civil, l’action en nullité se prescrit par cinq ans. La qualification de prix vil, relevant de l’appréciation souveraine des juges du fond, l’office des conseillers de la troisième chambre civile était limitée à la détermination du délai de prescription. Censurant ainsi les juges du fond sur ce point, la haute cour casse l’arrêt d’appel en prenant le soin de distinguer la nullité pour absence de prix sérieux et la rescision pour lésion de plus des 7/12e.

Cet arrêt se place dans la continuité d’une jurisprudence ancienne déjà affirmée de nombreuses fois par la Cour de Cassation. Il s’agit donc ici d’une véritable consécration jurisprudentielle. Ainsi si dès 1958 la chambre commerciale affirmait cette distinction entre rescision pour lésion et vileté du prix, ce principe sera repris dans de nombreux arrêts : Civ 1., 5 déc. 1960, Civ.3, 16 déc. 1998, ou encore Civ. 3, 18 juillet 2001.

B’) Interrogation quand à la nature de la nullité pour vileté du prix.

Une question reste toutefois posée à laquelle la troisième chambre civile ne répond pas expressément : celle de la nature de la nullité. On sait que, traditionnellement, le prix vil, dérisoire ou non-sérieux était sanctionné par la nullité absolue du contrat (Civ. 16 nov. 1932). Pourtant, une analyse contemporaine des nullités, fondée en partie sur les travaux de Japiot (Des nullités en matière d’acte juridiques) sanctionne la nullité pour absence de cause, et donc subséquemment à la vileté du prix, par la nullité relative de l’acte, puisque ne sont en jeu que les intérêts privés des parties.

La jurisprudence a prêté la main à ce mouvement, et notamment les chambres civiles de la Cour de cassation, parmi lesquelles la troisième dans un arrêt du 29 mars 2006.

La chambre commerciale reste toutefois à l’écart en maintenant la nullité absolue dans ces circonstances (Com. 23 oct. 2007)

Bien que ce débat ait perdu de son importance pratique depuis que l’article 2224 du code civil a ramené le délai de prescription de droit commun à cinq ans, rien ne peut faire douter ici que la troisième chambre civile maintienne sa position contemporaine en adoptant la nullité relative.

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