Terre des hommes

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Dans « Au centre du désert », Saint-Exupéry évoque longuement une terrible aventure vécue avec son navigateur André Prévot. Au cours d'un vol de routine, leur avion s'écrase en plein désert. Nulle réparation n'est possible. Ils n'ont presque rien à boire, pratiquement rien à manger. Nul ne sait où ils sont. Au cœur du Sahara, la chaleur est sans pitié et tue en à peine trois jours. Pourtant, les deux hommes vont marcher, marcher encore, et puiseront dans leurs forces physiques et mentales jusqu'à une profondeur qui leur était inconnue. Ils vont parcourir une incroyable distance, dans toutes les directions. Désespérés, ils finissent par abandonner l'épave pour marcher droit devant eux, trompés par les mirages qui leur font miroiter l’espoir de lacs et de villages. C'est quand la mort est toute proche, quand les yeux des deux naufragés sont envahis de brillantes lumières qui annoncent la fin, qu'ils croisent la route de bédouins. L'eau que ces hommes du désert leur donnent est celle d'une seconde naissance, la matérialisation de la vie même.

L'ultime chapitre s'intitule « Les hommes ». Les hommes y sont décrits comme des grains jetés au gré du hasard par le semeur. Certains disparaissent, comme ces combattants de la guerre civile espagnole que l'écrivain décrit à la veille d'un combat dont ils savent qu'ils ne reviendront pas. Les hommes choisissent un destin, et la terre sait reconnaître le blé qui engendrera de nouvelles semences. Les hommes ne sont esclaves que là où les coups de pioches qu'ils donnent n'ont pas de sens. La vie est alors un bagne. S'élever au-dessus de la condition servile, c'est vouloir s'évader du bagne et donner un sens à ses actes. Mais il faut donner à l'homme une chance de croître, comme le blé. S'il est broyé par la machine, le petit de l'homme ne sera qu'une brute. Terre des hommes se termine sur la vision d'un couple, dans un wagon de troisième classe, endormi par la fatigue que procure une vie abrutissante. Entre eux, leur fils, au visage encore intact, peut-être un futur Mozart. Et Saint-Exupéry se désespère non pas devant la laideur physique ou les cicatrices, mais en pensant au Mozart qui a été assassiné dans tant et tant d'êtres humains. Pour que l'homme soit Homme, il faut que l'Esprit ait soufflé sur lui.

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