Ruy Blas - Victor Hugo. 1838

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On assiste également ici à un mélange des genres ; une pratique complètement opposés au théâtre classique.

Premièrement, on dénote une scène au caractère tragique, du fait de la mort de Ruy Blas sur scène, accentué d’une part par cette idée de fatalité du destin inévitable, et d’une autre part par cette amour réellement destructeur.

Et deuxièmement, on dénote dans la continuité du texte une scène au caractère largement lyrique, du fait que Ruy Blas avoue ses sentiments pour La Reine, avant que la Reine ne lui les avoue aussi “je te pardonne et t’aime et je te croi” (v2240), ce qui donne finalement un caractère pathétique à l’oeuvre,car sous ses yeux et dans l’angoisse que l’on note par le passage soudain du Vouvoiement au Tutoiement “Qu’avez vous fait? Dis moi!” (v2239) ou bien par le choix de l’auteur d’utiliser des stichomythies pour manifester les échange entre les deux personnages “Jamais! / Jamais! / Bien sûr? / Non jamais!” (v2235) que la Reine se voit perdre l’homme qu’elle aime.

Il s’agit donc réellement d’une mise en scène classique, dans un drame romantique.

Dans ce texte, il n’est pas absurde de dire que Ruy Blus prend l’étoffe et se comporte comme un réel héros, car non seulement la majeur partie de l’intrigue tourne autour de lui, mais nous pouvons surtout dénoter le fait que Ruy Blas, simple roturier, et valet au bon coeur (un mythe d’ailleurs emprunté à Molière) parvient par sa mort à se transformer en un véritable héros. Et bien que l’on décèle chez ce héros quelques troubles comme le prouve un nombre important d’enjambements et de rejets des vers 2223 à 2229 “je vais de point en point/tout dire” (v2224.2225), son comportement demeure particulièrement héroïque, car il décide avec grande assurance de faire face à cette fatalité et de mourir en buvant un poison “Quel est ce philtre étrange?” (v2228), alors qu’il aurait pu choisir la facilité en fuyant.

De plus, c’est à travers différents figures de rhétoriques que nous pouvons parler d’un réel courage héroïque, un courage finalement très étonnant chez Ruy Blas. En effet, nous pouvons relever des chiasmes et parallélismes symbolisant cette amour sublimé par la souffrance auquel il décide de faire face “Vous me maudissez, et moi je vous bénis” (v2236) “Vivant, par son amour, mourant, pour sa pitié” (v2248). En outre malgré le pardon de sa bien aimée, il ira au bout de ses actes, tel qu’il l’a décidé.

Sa mort s’effectue de manière très spirituelle, et nous manifestons la présence certaine de la religion dans les propos de Ruy Blas “Mon dieu” (v2232 et 2245) “Du poison! Dieu!” (v2249) ce qui donne une dimension sublime et héroïque du sacrifice de Ruy Blas qui va jusqu'au bout de son destin pour sauver le reine (« Fuyez d'ici ! - Tout restera secret - ») Ruy Blas donne réellement sa vie pour la reine. et finalement sa mort permet un rapprochement entre celui-ci et la reine avec l’évolution des dénominations dans les répliques de la reine « Don César » > « César » > « Ruy Blas » et la disparition du fossé social entre les deux personnages visible dans l'énonciation.

Mais encore plus que cela, cette mort a inspiré l’auteur qui donne un nouveau rythme à cette pièce qui prend une allure plus dynamique, mais plus tragique, à l’aide de ce que l’on appelle le trimètre romantique, puisque l’auteur met un divise trois accent en trois mesure de trois partie divisé en quatre syllabes “Ayez pitié de moi, mon Dieu! mon coeur se rompt!” (v2232)

En clair, Ruy Blas comporte la totalité des qualités attendus d’un héros romantique. Il s’éteint dignement et tragiquement tel un héros “Merci”

En conclusion, dans ce drame c'est par son sacrifice que le héros Ruy Blas a atteint le même niveau que la reine, et d'ailleurs cette dernière se laisse emporter par la grandeur sublime du personnage. Elle fait le même chemin que lui et lui pardonne. Les deux amants se croisent, et ne se seront pas compris. Le héros romantique n'est pas viable, trop complexe, déchiré par ses conflits internes, écartelé entre deux identités. Seul le suicide demeure libérateur et confesse à Ruy Blas une dimension romantique. La fatalité règne dans tout le drame, marqué par ailleurs par un profond pessimisme et symboliquement, la trajectoire de Ruy Blas peut se lire comme une représentation de la condition populaire au XIXème siècle dans une société où toute ascension sociale est impossible, indépendamment des qualités individuelles de chacun.

Pour finir, nous pouvons mettre cette oeuvre en relation avec Phèdre de Racine, puisque bien d’époque très différentes, nous pouvons reconnaître chez Racine un mélange dans les registres similaires à Victor Hugo, de plus, qu’il n’est pas absurde de dire que la mort de Phèdre a inspirée la mort de Ruy Blas : elle s’éteint dignement telle une héroïne, sur scène, dans une scène non-violente.

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