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Le monde de l'atelier Lyon XIX

Par   •  19 Décembre 2017  •  1 967 Mots (8 Pages)  •  491 Vues

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Il emploie généralement 4 ou 5 ouvriers, également appelés compagnons, qui travaillent avec lui. On n’en voit pas ici, nous y reviendrons. Sa femme et ses enfants participent aussi. Les enfants sont appelés « lanceurs » car ils lancent la navette qui distribue le fil de soie le long de la chaîne de certains tissus (sauf lorsque le métier est muni du système de « navette volante » mis au point par l’anglais John Kay en 1733 et qui propulse automatiquement les navettes). Les femmes sont généralement employées à des travaux annexes, tels que le dévidage, la confection des canettes ou l’ourdissage (préparation des fils de chaîne).

II/ … et lieu de vie…

- Un espace privé réduit au minimum

Si l’atelier est le lieu de travail du canut, celui-ci travaille à domicile : son atelier est donc aussi son lieu de vie, même s’il est majoritairement occupé par les instruments de travail. L’espace réservé à la vie privée est extrêmement limité : ramassé autour de la cheminée, il occupe la partie gauche de la gravure. Les possessions du canut se limitent au mobilier le plus indispensable : une table, cinq chaises, quelques meubles pour entreposer la nourriture et des ustensiles destinés à la préparation des repas. On remarque la présence de deux seaux, indispensables pour apporter l’eau. L’un d’eux, posé sur une table à droite de la cheminée, sert vraisemblablement à faire la vaisselle. On peut voir juste à côté un égouttoir en bois sur lequel les assiettes sèchent.

Une soupente (ou « suspente ») est aménagée afin de servir de chambre à coucher au-dessus de la cheminée (ce qui permet sans doute de profiter la chaleur qui en émane). On y accède par une échelle.

Le dessinateur a choisi de représenter l’atelier alors qu’on s’apprête à passer à table. Cela lui permet de donner à voir la famille du canut. Suivant une répartition des rôles des plus traditionnelles, sa femme sert la soupe, qui chauffe dans la cheminée : elle a posé par terre le couvercle de la marmite, ses deux filles apportent les bols à table. Une personne âgée est assise près de la cheminée, peut-être un parent du canut qui vit sous son toit. 5 personnes vivent donc dans une seule pièce, largement réservée au travail. Rien ne laisse supposer que la famille s’octroie des loisirs : il n’y a par exemple ni jouet, ni journaux.

- Des conditions d’hygiène médiocres

Certes, l’invention du métier Jacquard, qui nécessite des ateliers plus grands, aux plafonds hauts, a permis aux ouvriers en soie de vivre dans des logements plus sains. Comme on peut le voir sur cette gravure, l’atelier est muni de grandes fenêtres qui permettent de faire entrer dans la pièce le maximum de lumière et d’air. Mais le confort reste spartiate et les conditions d’hygiène semblent laisser à désirer. Il n’y a ni WC privés ni salle de bain, la toilette se fait avec l’eau des seaux. Deux chats sont visibles au premier plan à gauche, ils sont utiles pour chasser les souris. Comme eux, l’oiseau en cage, qu’on aperçoit à l’arrière-plan, n’est pas un simple animal de compagnie mais remplit un rôle important : il est sensé, selon son état, permettre de vérifier si l’air n’est pas trop chargé en gaz carbonique.

III/ … en pleine crise.

- La crise de 1877

L’industrie de la soie est une industrie de luxe : elle est très dépendante de la conjoncture économique et du marché extérieur. En 1877, de mauvaises récoltes provoquent une forte hausse du prix de la soie : les acheteurs abandonnent le tissu devenu trop cher, les négociants qui n’arrivent pas à écouler leur stock ne commandent plus de nouvelles pièces, la « morte » (le chômage) touche la plupart des ateliers. En janvier, les deux tiers des ouvriers de la soie sont au chômage. L’année 1877 est marquée par une chute de la production de 43% par rapport à 1876 : c’est la première fois qu’on enregistre un tel effondrement.

- Ses conséquences sur une famille d’ouvriers

La gravure cherche à rendre cette atmosphère de crise : il s’agit d’attirer l’attention sur les difficultés rencontrées par les ouvriers en soie. De nombreux signes témoignent du désœuvrement qui frappe l’atelier. Le métier est à l’arrêt (à l’automne 1876 c’est le cas de la moitié d’entre eux à Lyon). On ne voit aucun compagnon, peut-être ont-ils été renvoyés ou bien ont-ils cessé de venir, faute de travail. C’est peut-être aussi pour cette raison qu’on ne voit pas de négociant. Le chef de famille, qui est aussi le chef d’atelier, est assis et affiche un air abattu, soutenant sa tête d’une main. Il semble que ses filles cherchent à le réconforter, l’une d’elle lui apporte un bol de soupe. On remarque au passage l’extrême simplicité du repas qui va être servi : on ne voit sur la gravure que de la soupe, et peut-être un morceau de pain sur le meuble à gauche (dont la porte et le tiroir sont d’ailleurs ouverts, comme pour montrer, peut-être, qu’il n’y a plus de provisions à l’intérieur).

Conclusion :

Le système de la Fabrique repose sur le travail à domicile, dans les ateliers et non à l’usine, ainsi que l’illustre bien cette gravure : il constitue une organisation du travail ancienne, qui se perpétue au XIXe siècle. Mais la répétition des crises qui affectent durement la soierie pose la question de la survie d’un travail artisanal dans le contexte d’une Europe en pleine industrialisation.

Bibliographie :

Yves LEQUIN, Les Ouvriers de la région lyonnaise 1848-1914, Presses Universitaires de Lyon, 1977.

Françoise BAYARD et Pierre CAYEZ (dir.), Histoire de Lyon du XVIe siècle siècle à nos jours, t. II, Horwath, 1990.

Schéma :

[pic 1]

1-Arrivée des fils de chaîne à partir de l'ensouple

2-Les fils de chaîne sont croisés pour ne pas qu'ils s'emmêlent

3-Les fils, entraînés par les lames montent ou baissent à tour de rôle pour former deux nappes

4- Les fils de trame sont envoyés un à un dans l'espace des deux nappes

5-Le peigne,

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