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Le recueil de la parole de l'enfant

Par   •  9 Juillet 2018  •  7 033 Mots (29 Pages)  •  533 Vues

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D’après le rapport de 2013 consacré aux droits de l’enfant[5], jusqu’à la période de la révolution française, l’enfant ne peut que difficilement s’exprimer car la spécificité de la période de l’enfance n’est alors pas reconnue au niveau des tribunaux. De plus, son expression est contrainte, entre autres, par le fait que la majorité est tardive puisqu’elle est fixée à vingt-cinq ans et le père a un droit de correction envers ses enfants (jusqu’en 1958). En France, c’est seulement à partir des années 1970 que les pédiatres et pédopsychiatres s’alarment des violences physiques faites aux enfants, ce qui permettra la création de structures d’accueil et d’accompagnement pour ces enfants et leur famille.

Cette mise en exergue des violences faites aux enfants va aboutir à la création de deux lois en France. Tout d’abord, la loi du 10 juillet 1989 « relative à la prévention des mauvais traitements à l’égard des mineurs et à la protection de l’enfance » va permettre à ces jeunes victimes d’être entendue par un juge et de raconter ce qu’ils ont subi, bien que leurs différents locuteurs éprouvent des difficultés pour évaluer les déclarations de ces enfants, en raison d’un manque de formation. S’ensuit la loi du 17 juin 1998 « relative à la prévention et à la répression des infractions sexuelles ainsi qu’à la protection des mineurs » qui promeut l’audition et la protection des enfants durant le processus judiciaire.

Parallèlement à la création de ces lois françaises donnant peu à peu une voix à l’enfant, il y a eut une évolution des mentalités autour du statut juridique de l’enfant au niveau internationale qui s’est répercuté au niveau national dans de nombreux pays, permettant à cette tranche de la population de se voir attribuer de plus en plus de droits. Il faut notamment souligner la Convention Internationale des Droits de l’Enfant votée par les Nations-Unies en 1989, convention acceptée en 1990 en France. Cette convention a pour but de prendre en compte l’intérêt supérieur de l’enfant en soulignant que ce dernier est porteur, certes de devoirs, mais aussi et surtout de droits qui sont à considérer davantage, on y évoquera notamment le droit à la parole de l’enfant. En effet, il est déclaré par l’article 12 que « Les Etats parties garantissent à l’enfant qui est capable de discernement le droit d’exprimer librement son opinion sur toute question l’intéressant, les opinions de l’enfant étant dûment prises en considération eu égard à son âge et à son degré de maturité. A cette fin, on donnera notamment à l’enfant la possibilité d’être entendu dans toute procédure judiciaire ou administrative l’intéressant, soit directement, soit par l’intermédiaire d’un représentant ou d’une organisation approprié, de façon compatible avec les règles de procédure de la législation nationale ».

En complétement de ce texte international apparaît la Convention Européenne pour l’exercice des droits des enfants de janvier 1996, ratifiée plus tardivement en France, en septembre 2007. Celle-ci va permettre à tout mineur de moins de 18 ans ayant une capacité de discernement, de pouvoir être informé, représenté mais surtout entendu dans les procédures le concernant. Ces enfants ont la possibilité de faire valoir leur droit eux-mêmes ou bien par le biais d’une autre personne. Il s’agit notamment des procédures familiales telles que la garde, la résidence, le droit de visite, l’adoption, l’assistance éducative, l’autorité parentale, le traitement médical, etc.

La loi du 4 mars 2002 « relative à l’autorité parentale» illustre bien l’accord avec la convention européenne pour l’exercice des droits de l’enfant puisque, en développant la notion de l’intérêt de l’enfant, elle va permettre à l’enfant suffisamment mature et donc capable de discernement de donner son avis lorsqu’il s’agira de prendre des décisions impactant son cadre de vie. Dans ce cadre, le juge aux affaires familiales prendra en compte, entre autres, l’audition de l’enfant pour rendre sa décision.

Puis, la loi du 5 mars 2007 réformant la loi « relative à la protection de l’enfance » a octroyé le droit à l’enfant de participer aux décisions dans lequel il est impliqué : « Dans toute procédure le concernant, le mineur capable de discernement peut, sans préjudice des dispositions prévoyant son intervention ou son consentement, être entendu par le juge ou, lorsque son intérêt le commande, par la personne désignée par le juge à cet effet ». Le second alinéa de l’article 388-1 prévoit que lorsque le mineur en fait la demande, l’audition est de droit. Au contraire, s’il refuse d’être entendu, le juge appréciera alors le « bien-fondé » de ce refus. Dans le cas ou le mineur est auditionné, la loi lui permet de le faire seul ou bien avec un avocat, ou encore accompagné d’une personne de son choix. L’audition devient alors un droit de l’enfant, qui ne peut être refusé par le juge que dans le cas où il estime que l’enfant n’est pas en capacité de discernement ou encore s’il n’est pas impliqué dans la procédure en cours.

En ce sens, l'article 338-1 du Code de procédure civile prévoit que "le mineur capable de discernement est informé par le ou les titulaires de l'exercice de l'autorité parentale, le tuteur ou, le cas échéant, par la personne ou le service à qui il a été confié de son droit à être entendu et à être assisté d'un avocat dans toutes les procédures le concernant". Il s’agit pour le juge de s’assurait que l’enfant ait bien prit connaissance de son droit de parole dans le cas ou ce dernier n’avait pas décidé d’office d’entendre l’enfant. Cependant, il n’est pas facile d’être certain que l’enfant ait reçu cette information, seul un avis, prévu par le décret n° 2009-572 du 20 mai 2009,rappelant aux parents d’informer leur enfant est joint aux convocations, sans réelle vérification ultérieure.

En 2010, les lignes directrices du comité des ministres du conseil de l’Europe sur une justice adaptée aux enfants se veulent être un « outil pratique aux Etats membres pour adapter leurs systèmes judiciaires et non judiciaires aux droits, intérêts et besoins spécifiques des enfants, et invite les Etats membres à en assurer une large diffusion auprès de toutes les autorités qui sont chargées de garantir le respect des droits des enfants dans le cadre judiciaire, ou qui, de façon générale, sont actives dans ce domaine»[6].

Parmi les éléments reconnus comme pertinents pour mener une justice adaptée aux enfants, le comité souligne

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