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La crise de l’État Nation

Par   •  8 Novembre 2018  •  2 687 Mots (11 Pages)  •  545 Vues

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les Algériens autochtones se voient proposer la nationalité française, mais à la condition que ceux-ci abandonnent la législation religieuse au profit de la législation civile française, ce qui revenait en fait à renoncer à leur identité culturelle et religieuse. Du fait du caractère absolutiste de la conception française de la nation, les autochtones sont face à un dilemme, soit ils sont exclus de la citoyenneté, soit ils renient leur nationalité. De plus, s’ils sont soumis à des obligations, des devoirs, notamment « l’impôt du sang » avec la participation aux deux guerres mondiales, ils manquent de droits, de prérogatives, or ce sont des éléments inséparables de la citoyenneté : ainsi coexistent deux catégories de population : les citoyens (les Français) et les sujets (autochtones).

Le cas de « l’Algérie française » est ainsi confronté à des contradictions inhérentes à la colonisation : non seulement la multiplicité des nationalités ne correspond pas à une nation, mais en plus, il faudrait distinguer plusieurs types de citoyenneté plus ou moins imparfaite. Ici, la concordance entre nationalité et citoyenneté n’a plus beaucoup de sens.

Mais ce n’est pas la seule crise à laquelle est confronté l’État-nation. L’État-nation a été confronté aux exigences des pouvoirs locaux à gérer de façon autonome leurs intérêts et à revendiquer de ce fait des transferts de compétence qui prennent la forme d’une autonomie régionale plus ou moins poussée.

En effet, la perte d’un Empire colonial a remis en cause la légitimité de l’État, ce qui a donc favorisé l’éclosion de revendications autonomistes. Ainsi, comme le dit Brigitte Krulic, la remise en cause de l’État-nation n’a pas seulement touché la France, mais aussi la Grande-Bretagne par exemple avec l’Irlande en 1969. Ce qui motive la plupart des mouvements autonomistes, breton, basque ou corse, est le sentiment de constituer une minorité, oppressée et victime de l’uniformisation de l’État nation, d’être rejeté par le centralisme politique, administratif et culturel de l’État nation. Comme le définit Lacoste, les mouvements autonomistes considèrent la réalité de l’État nation comme un centre dominant, opposé à une périphérie dominée, ce qui reviendrait à dire que, les minorités basques ou corses subiraient « une colonisation de l’intérieur ». Ces contestations autonomistes trouvent aussi des échos dans le champ économique : elles dénoncent l’appauvrissement des provinces au profit de Paris (« Paris et le désert français ») du fait des mouvements de population, mais elles dénoncent aussi le « détournement » des richesses et des potentialités régionales au profit de système national et non au profit de la région.

Ces différentes revendications ont abouti à un débat qui paraît nécessaire sur la décentralisation : c’est-à-dire une réforme qui réorganise des répartitions des compétences entre l’État et les institutions régionales et locales, effectuées entre 1982 et 1991. Cette réforme a montré l’incohérence et l’inadéquation politique de l’État-nation « jacobin ». Ce qui nous amène à dire que, si le modèle de l’État-nation « jacobin » est en crise, il ne faut pas interpréter ceci comme son irrémédiable fin, mais plutôt comme une évolution nécessaire, du fait de plusieurs facteurs que nous allons traiter ensuite.

II) Le modèle de l’État-nation, du fait d’influences externes, est voué à une certaine évolution

A) La construction européenne et la mondialisation sont au cœur de cette évolution

D’une part, la mondialisation fait peser sur le modèle de l’État nation certaines contraintes dues à la mondialisation des échanges et des communications qui relativisent l’existence des frontières et l’exercice de la souveraineté étatique. D’autre part, l’actuel contexte économique ; où les économies des États sont interdépendantes les unes des autres, fait que les États ont progressivement perdu la maîtrise des leviers de commandement. Le même phénomène se produit aussi en droit international, où certaines évolutions ont eu lieu, notamment avec l’apparition du droit d’ingérence qui affecte dans une certaine mesure le principe de la souveraineté nationale de l’État-nation. Depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, les organisations internationales se sont multipliées. C’est ce qu’explique Philippe Moreau-Desfarges : «  à un niveau international, l’État ne peut invoquer sa souveraineté comme le droit de faire tout ce qu’il veut chez lui, sans contrôle. L’État se trouve désormais sous la surveillance multiforme et croisée d’innombrables instances : les organisations non gouvernementales, les agences de notation, les organisations interétatiques (notamment FMI).

La mise en place de l’Union européenne apporte elle aussi un lot de problématiques posées au modèle de l’État-nation. Elle aussi peut remettre en cause la souveraineté nationale d’un État, et cela s’exprime dans le débat qui oppose les partisans d’une Europe des États, et les partisans d’une Europe fédérale (soit les « États-Unis d’Europe »). C’est le traité de Maastricht, adopté en 1991, qui est le plus déterminant en matière de souveraineté nationale, c’est lui qui délimite les domaines dans lesquels s’effectuent certains transferts de souveraineté, notamment en économie et en politique. En économie, ce traité permet la réalisation de l’Euroland, c’est-à-dire l’union économique et monétaire, ce qui entraîne un certain nombre de conséquences.

Premièrement, le fait d’abandonner les monnaies nationales pour l’euro et le transfert de compétence des Banques centrales nationales vers une unique Banque centrale européenne marque la fin d’un droit, qui était du ressort de l’État seul, celui de battre monnaie. Deuxièmement, cet espace unique monétaire oblige à une coordination entre tous les États membres en politique budgétaire : la souveraineté nationale est encadrée par les stipulations du Traité de Maastricht en matière de dépenses publiques par exemple.

Dans le domaine de politique d’immigration et de maîtrise des flux migratoires se met aussi en place un transfert de compétences, alors que, jusqu’alors il s’agissait de prérogatives nationales et non européennes. Ce transfert est marqué par l’accord de Schengen qui abolit par exemple les frontières intérieures dans les pays membres de l’espace Schengen, ou qui établit un fichier d’information de personnes impliquées dans la grande criminalité.

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