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Autoportraits, Francis Bacon

Par   •  11 Octobre 2018  •  1 798 Mots (8 Pages)  •  625 Vues

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Ainsi, comme on le sait dans l’histoire de l’art, pour échapper au figuratif, il y a soit l’abstraction, soit comme la technique de Bacon, l’extraction ou l’isolation. Le peintre traite la figure humaine comme le reste du tableau, c'est-à-dire, il n’y a ni profondeur, ni un fond, ni une perspective : ce n’est plus un paysage. Ce qui occupe le reste du tableau ce sont des aplats de couleurs vives, uniformes et immobiles qui structurent la figure dans le même plan.

[pic 3]

Triptyque (1976), par Francis Bacon 1, Huile et pastel sur toile

198 x 147,5 cm pour chaque tableau

1976

[pic 4]

L’exemple de cet autoportrait de 1976, qui est l’un des panneaux du tryptique de 1976, montre le style du peintre qui rejette l’idée de perspective puisque le sol lumineux est placé de façon à être verticale. Les aplats au fond et la forme de la figure sont verticales, placés comme des éléments à part entière, un peu superposés, connectés mais surtout ils sont isolés. Le personnage ne fait pas partie d’un espace. Il est présent sous une forme floue. Nous reconnaissons la chaise à travers sa forme à côté du personnage qui élimine la profondeur.

Quant au tryptique, comme nous venons de le voir, le tryptique permet de donner beaucoup plus de force et donc beaucoup plus de sensation. Il permet également de donner un rythme et de faire passer la sensation à différents niveaux. La décomposition du tableau rappelle justement le cubisme de Picasso où les visages sont morcelés et reconstruits d’après plusieurs points de vue. Dans le tableau de Bacon, le visage présente plusieurs mouvements au même temps et le tryptique renforce cette mobilité.

[pic 5]

Huile sur toile

35,5 x 30 cm

1980

Bacon s’approche de l’abstraction parce que la touche dépasse la forme. Cela est fait justement grâce aux couleurs et leurs alternances sur le fond noir. Cette technique est appelée par l’artiste « le diagramme », c'est-à-dire les marques, les grosses touches et les taches de couleurs qui vont venir recouvrir ou effacer la figure.

La logique du tryptique repose donc sur la règle de Rembrandt : « le maximum d’unité et de lumière et de couleur, pour le maximum de division. »[1] Cela permet au peintre de renforcer la sensation.

En outre, s’il y a quelque chose de sensationnel dans ces figures floues, c’est justement parce que rien de visible n’arrive. En d’autres termes, l’horreur exprimée ne dépend plus de ce qui est représentée mais de ce qui est sentie par l’instinct de l’homme. Ce qui rejoint l’hypothèse de la bestialité de l’homme. L’artiste fait en effet de la tête un bloc de chair sans orbites. Deleuze appelle cela la « tête-viande ». Nous pouvons sentir justement toute la force et la violence à travers cette association entre la figure humaine et la bête, à travers la représentation de la tête en « viande » et à travers le mouvement inexplicable qui se traduit par une sorte de vibration, ou encore un « spasme ».

[pic 6]

Etude pour un autoportrait,

par Francis Bacon, Huile sur toile

198 x 147,5 cm

1976. Art Gallery of New South Wales, Sydney, Australie

Tout le corps se représente sous la forme de viande. L’influence du cubisme est claire à travers l’arrière plan.

En guise de conclusion, l’isolation, le tryptique, la sensation et le mouvement ont pour but de représenter une figure contre la figuration. Il importe de souligner ainsi que Bacon peint à partir des photographies en s’intéressant notamment aux photos ratées, aux radiographies, c'est-à-dire à tout ce qui peut toucher aux déformations du corps et de l’espace. Finalement, voilà ce que Simone Douek a dit à propos de lui :

« Peintre de la violence, de la cruauté et de la tragédie d'où, à ses dires : « l'odeur du sang humain ne me quitte pas des yeux », l’œuvre de Francis Bacon se déploie à travers ses tableaux et grands triptyques en mettant en scène sa vie, ses amis, ses sources d'inspirations ... Il a peint des portraits, des autoportraits, des têtes, des corps, cabossés, dépecés, lacérés, bousculés. Et pourtant, de ces portraits, sort la ressemblance ; de ces corps, de ces cris, émanent une interrogation et un doute permanents. Cet autodidacte de la peinture enregistrait, selon son expression, toutes les perceptions que lui donnaient le monde et la vie des gens qui l’entouraient, et il peignait les multiples souvenirs superposés de leur existence. Dans cette figuration choisie par lui - il disait l’abstraction de son époque trop esthétisante pour la tension et l’excitation qu’il ressentait - c’est aussi au mouvement saisi dans son essence même, que l’on est confronté. Le mouvement de la chair qui parfois se liquéfie en coulées grises, le mouvement du temps qui laisse voir le spectre des cadavres sur les triptyques, le mouvement de la peinture qui peut rendre la figure évanescente - mais c’est peut-être illusion car elle nous projette toujours avec violence son extrême présence. Et nous, nous nous interrogeons sur ces images, sur cette nudité, sur cette vulnérabilité, sur ces métamorphoses, sur ces blessures et sur ce sang, sur la couleur, sur les accidents de la création, sur la peinture enfin. « Faire une peinture qui ne transmette qu’elle-même », a dit Gilbert Lascaux à son propos. »

Bibliographie:

- Dictionnaire Larousse, articles: Francis Bacon et expressionnisme

- Francis Bacon, étude de la logique de la sensation, Gilles Deleuze

- Simone Douek à propos de :

Une vie une oeuvre : Francis Bacon, 1909-1992

France culture

Émission du 15 Juin 2003.

- Documentaire, Francis Bacon au-delà du réel: la vérité

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