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Dissertation: argumentation

Par   •  24 Juin 2018  •  3 018 Mots (13 Pages)  •  574 Vues

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une thèse. Les isoler ou au contraire les mêler donnent lieu à une certaine diversité du genre. D’ailleurs, on peut user de ces stratégies dans différents genres littéraires, c’est pour cela que nous allons maintenant nous intéresser à l’argumentation directe, et tout particulièrement à l’essai.

L’argumentation directe est un type d’argumentation qui consiste à exprimer sa pensée sans faire détour, sans avoir à passer par un autre genre littéraire. Elle est qualifiée ainsi par rapport à l’énonciation choisie. On peut aussi parler d’essai. Nous étudierons donc l’origine de l’essai au préalable, puis nous verrons que l’essai peut prendre multiples formes.

Michel de Montaigne, un humaniste du XVIe siècle, est le premier à parler d’”essai” en titrant son unique œuvre de cette façon, inventant par conséquent le genre même de l’essai. Son ouvrage, sur lequel il a travaillé pendant la majeure partie de sa vie et qu’il n’a cessé d’annoter jusqu’à sa mort, devient dès lors une véritable référence du genre. Montaigne utilise ce mot à dessein car, tirant son éthymologie du latin «exagium» signifiant «pesée», il lui permet de s’émanciper de toute prétention et autre malhonnêteté intellectuelle. En effet par «essai» il entend «tentative», «ébauche», ce n’est qu’un ouvrage au ton personnel reflétant les expériences et les pensées de son auteur, rien d’inscrit dans la pierre. Dans ses Essais, Montaigne fait l’essai de son jugement sur un certain nombre de sujets, avec entre autres la critique de la société. Ainsi dans son essai «De l’expérience» tiré du livre III des Essais, publié en 1592, Montaigne fait une critique des vanités du genre humain, telles que l’orgueil et la violence: il se fait moraliste et prend un ton accusateur en opposant la vie guerrière à la vie paisible, il multiplie de fait les antithèses comme par exemple “plaisirs naturels” et “violentes occupations et laborieuses pensées” et c’est avec cette périphrase que Montaigne fait l’analogie entre le caractère guerrier de l’homme et les guerres de religions, se déroulant au même moment, et le dénonce ainsi.

L’essai peut aussi prendre des formes très variées. C’est cette liberté dans la forme qui fait que les auteurs y recourent si souvent depuis son invention. On peut notamment citer la lettre, une œuvre épistolaire ou bien un article destiné à être publié, de façon privée ou publique. On pense immédiatement à l’article d’Émile Zola paru dans le quotidien L’Aurore en 1898, «J’accuse!», destiné au président de la République de l’époque, Félix Faure. Zola s’oppose à la condamnation d’Alfred Dreyfus, accusé d’avoir livré des secrets aux allemands, qui fut un sujet d’actualité brûlant à la fin du XIXe siècle. Dans ce pamphlet, Zola utilise l’anaphore “J’accuse” afin de pouvoir dénombrer simplement la quantité de ses accusations, dynamisé par des paragraphes de plus en plus courts, à valeur polémique, elle-même soulignée par l’utilisation d’un vocabulaire agressif. Zola a conscience des risques qu’il encourt mais s’engage néanmoins dans cette lutte contre une justice laxiste et l’antisémitisme. Dans un autre registre, dans la lettre 81 Les Liaisons Dangereuses de Pierre Choderlos de Laclos en 1782, l’auteur dénonce la condition féminine de l’époque à travers le personnage de la marquise de Merteuil: en utilisant un registre argumentatif, celle-ci souhaite faire comprendre au vicomte qu’elle est différente des autres femmes de son époque, et veut lui montrer sa supériorité à travers la dissimulation, la manipulation et son libre-arbitre, quand les femmes se devaient d’être vertueuses et étaient éduquées dans le but de vivre dans la soumission et la dépendance; une situation qui pousse le lecteur à s’interroger sur la place de la femme au XVIIIe siècle. L’œuvre crée bien évidemment la controverse, faisant l’apologie d’un thème subversif: le libertinage.

D’ailleurs, dans la lignée de l’exemple précédent, l’on peut remarquer que certains problèmes de société d’une époque n’ont pas changé à une autre et que, de la même façon, les formes utilisées pour les dénoncer restent intemporelles. C’est le cas par exemple de l’essai féministe de Simone de Beauvoir, Le Deuxième Sexe, en 1949, qui provoque un tollé chez les Catholiques tout en suscitant des protestations hostiles. Elle dénonce le peu de création artistique émanant des femmes et l’explique par leur soumission forcée par une société masculine. Elle soutient sa thèse en fournissant un raisonnement inductif au lecteur, citant entre autres des exemples tels que la colonisation des Américains par les Anglais au XVIIIe siècle et l’esclavage des noirs, pour en aboutir à la conclusion que ces groupes de gens n’ont rien pu créer car ils étaient soumis à un autre groupe de personnes. Elle emploie aussi un argument d’autorité en citant la lettre d’Arthur Rimbaud à Paul Demeny puisqu’il s’agit d’un auteur incontesté, il affirmait alors que des poètes naîtront “quand sera brisé l’infini servage de la femme, quand elle vivra pour elle et par elle”, De Beauvoir utilise aussi des modalisateurs pour exprimer ses doutes et nuancer l’affirmation de Rimbaud, mais ne la rejette pas pour autant, pensant que la libération de la femme est nécessaire pour le monde entier, car des femmes libérées auront l’occasion de devenir artistes.

Ainsi, ces exemples prouvent donc bien que l’argumentation directe est un moyen efficace, bien que risqué, de prendre des positions contre la société tout en fournissant une argumentation simple et logique, qui se caractérise aussi bien par son honnêteté intellectuelle que par la liberté de ses auteurs d’en modifier les contours. En bref, on offre une argumentation solide sans faire de détour, ce qui s’oppose à l’argumentation indirecte, ou apologue, qui passe par le biais de la fiction pour faire passer un message. La Fontaine disait à propos de l’apologue qu’il s’agissait d’”un charme: il rend l’âme attentive, / Ou plutôt, il la tient captive”. Nous allons donc voir à présent pourquoi certains auteurs tels que La Fontaine recourent à la fiction pour fournir une argumentation et ce que cela apporte.

L’argumentation indirecte se distingue l’argumentation directe car c’est un type d’argumentation qui passe par la fiction, et par conséquent par d’autres genres littéraires tels que la poésie ou le théâtre. En d’autres termes, aussi paradoxal que cela puisse paraître, cela signifie ce type d’argumentation sollicite l’imaginaire afin de soutenir une opinion sur un élément bien ancré

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